Chirurgie de la hanche : saignement post-opératoire

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Chirurgie de la hanche : saignement post-opératoire - Cas clinique

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Saignement per et post-opératoire après pose de prothèse de hanche chez un homme de 80 ans.

  • Chirurgien
Auteur : La Prévention Médicale / MAJ : 17/06/2020

Quels sont les faits?

  • Homme né en 1921, suivi pour arythmie complète par fibrillation auriculaire et insuffisance coronaire  avec un traitement au long cours par anti-agrégant plaquettaire (Cardiosolupsan®).
  • Consultation d'un chirurgien orthopédiste pour une coxarthrose droite très invalidante avec un périmètre de marche inférieur à 300-400 mètres sans canne et une gêne certaine dans les gestes de la vie courante.
  • Décision de la pose d’une prothèse totale de hanche après accord du cardiologue du patient : « je ne vois pas de contre-indication à une anesthésie générale pour sa chirurgie de hanche avec les précautions habituelles d’anti-coagulation per-opératoire (petite dilatation de l’oreillette gauche sans thrombus visible…».
  • La veille de l’intervention, un bilan sanguin était réalisé mettant en évidence une hémoglobine à 15.9 g/100 ml et des facteurs de coagulation normaux dont un temps de saignement à 3 minutes ainsi qu’une détermination du groupe sanguin (O Rh négatif avec absence d’agglutinines irrégulières). En pré-opératoire immédiat, injection d’ HBPM (dose ?)
  • 12 h 00 : arthroplastie totale de la hanche sous anesthésie générale.
  • Le chirurgien considérait que l’intervention s’était déroulée sans incident particulier mais il était noté dans le compte rendu opératoire : « saignement diffus peu abondant au niveau du spongieux cotyloïdien … ». - La feuille de surveillance d’anesthésie mentionnait que l’intervention avait duré 3 heures. Le saignement per-opératoire n’était pas comptabilisé ni par l’anesthésiste-réanimateur (ARE) ni par le chirurgien. - Il n’y avait pas eu de transfusion per-opératoire et la pression artérielle en fin d’intervention était notée inférieure à 8. - Ultérieurement, le chirurgien affirmait qu' « (…) en fin d’intervention le champ opératoire était parfaitement sec … », et qu’il estimait la perte sanguine per-opératoire : «à la quantité recueillie dans le flacon de Redon soit entre 500 et 830 ml ». - La prescription post-opératoire faite par l’ARE mentionnait la perfusion de 2 litres de sérum glucosé (Osmotan®) pour 24 heures et un contrôle hématologique pour le lendemain matin.
  • 14  h 00 : le patient était transféré de la SSPI au service de soins intensifs  toujours avec une tension inférieure à 9 et une fréquence cardiaque s’accélérant à 100/min.
  • Le pansement était noté « tâche délimitée » puis à 15 h 15 « tâché +++ ».
  • Trente minutes plus tard, le chirurgien passait voir le patient et faisait renforcer le pansement.
  • 17 h  45, le Redon donnait 550 ml. Le pansement à nouveau tâché était « reconsolidé ».
  • 19 h  20, visite de l'ARE de garde.
  • Entre 19 h 30 et 22 h, la fréquence cardiaque était très accélérée, supérieure à 150/min et la pression artérielle instable. Le pansement noté « tâché ++ »  était de nouveau consolidé. Le Redon avait donné 700 ml.
  • Le lendemain, à 0 h 30, l’infirmière de garde notait « saigne +++++ » et appelait le chirurgien qui prescrivait par téléphone de refaire un pansement compressif et de surveiller le patient en le rappelant si besoin.
  • La perte sanguine dans le pansement était évaluée à 1000 ml par l’infirmière.
  • 1 h 30, l’ARE se rendait au chevet du patient et notait « saignement ++ par redon et pansement, PA 97/44 – pouls 130 » et prescrit « Redon non aspiratif, Cordarone® 2 ampoules IV et remplissage par Elohes 500® + Cordarone® 6 ampoules/250 ml pour pouls supérieur ou égal à 120 – oxygène masque 3 litres ».
  • Après avoir effectué ces prescriptions, l’infirmière notait « a bien réagi après un nouvel épisode de tachycardie et de semi-coma ».
  • Entre 5 :00 et 6 :00 h, l’ ARE de garde était à nouveau prévenu que le pansement recommençait à saigner en nappe.
  • A 7 h 00, il descendait auprès du malade et demandait que le Redon soit remis en aspiration et que les examens de laboratoire soient récupérés en urgence.
  • Mais ce n’est qu’à 9 h 44 que l’examen sanguin prévu la veille était enregistré par le laboratoire (extérieur à la clinique). Les résultats étaient immédiatement communiqués à l'ARE qui avait remplacé l’ARE de garde. Ils mettaient en évidence une hémoglobine à 5.5 g/100 ml avec augmentation de la créatinémie et chute de la réserve alcaline. L'ARE prescrivait alors 500 ml d’Elhoes®, 1/2 mg d’Atropine et commandait par téléphone 4 culots globulaires de sang O Rh négatif.
  • Le CTS ne pouvait délivrer que 2 culots dont le premier était passé à 11 h 30 et le second à 14 h 30.
  • Dans les 12 heures suivantes, le patient recevait 6 culots globulaires O Rh positif.
  • A 19 h, le bilan sanguin montrait une remontée de l’hémoglobine à 10 g/100 ml mais un effondrement des facteurs de coagulation et des plaquettes compatible avec un syndrome de coagulation intra-vasculaire disséminée.
  • Persistance du saignement dans la soirée et la nuit aboutissant au décès du patient le 17 mai dans la matinée.

Ce matériel est réservé à un usage privé ou d’enseignement. Il reste la propriété de la Prévention Médicale, et ne peut en aucun cas faire l’objet d’une transaction commerciale.

Résumé des faits

Décès par hémorragie post opératoire tardivement diagnostiquée et traitée après mise en place d’une prothèse de hanche

  • Avis imprécis du cardiologue sur la gestion pré-opératoire du traitement antigrégant plaquettaire
  • Injection en pré-opératoire immédiat d’une dose d’HBPM
  • Non évaluation du saignement per-opératoire
  • Absence de protocole de surveillance post-opératoire (d’où retard de la demande d’examens biologiques)
  • Absence de coordination chirurgien - anesthésiste réanimateur
  • Prescriptions téléphoniques du chirurgien
  • Absence de disponibilité des anesthésistes réanimateurs (bloc opératoire, interfaces garde/ heures ouvrables), d’où retard de la transfusion sanguine
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