Mlle F., 17 ans, consulte un chirurgien maxillo-facial pour une potentielle extraction des 4 « dents de sagesse », sur les conseils de son orthodontiste. Il estime que ces dernières n’ont pas assez de place et qu’elles sont en pleine éruption. Les autres dents ont déjà bougé…
Après l‘interprétation du panoramique dentaire, le chirurgien propose effectivement leur ablation. La jeune fille, accompagnée de sa maman, accepte l’opération. Les informations sur les bénéfices-risques sont énoncées, ainsi que les quelques complications possibles en lien avec la chirurgie.
L’intervention étant prévue sous anesthésie générale, elle consulte le médecin anesthésiste qui donne son feu vert à sa réalisation : AG avec intubation nasotrachéale pour ne pas gêner le travail du chirurgien, classée ASA2 en raison d’un asthme ancien (pas de crise depuis 4 ans).
Cette prise en charge est prévue dans le cadre d’un parcours ambulatoire. Le jour J, elle est conviée à se présenter dans le secteur de soins à 9h30 pour un geste opératoire prévu à 11h00. A son arrivée, les différentes formalités administratives sont faites, et notamment le contrôle de la complétude du dossier et l’autorisation parentale d’opérer signée par les 2 parents.
Elle est prise en charge au bloc opératoire par l’équipe pluridisciplinaire. Il convient de préciser qu’elle entre en salle d’opération à 11h45, soit avec près de 45 minutes de retard car le chirurgien a rencontré des difficultés techniques pour les extractions précédentes pour 2 patients avec des dents incluses plus profondément, générant de fait un allongement de la durée opératoire.
L’induction anesthésique est réalisée sans difficulté particulière, le geste opératoire également. A la fin de l’acte opératoire, le chirurgien met une « gentille pression » à toute l‘équipe au motif qu’il est en retard, qu’il faut accélérer un peu car il a un impératif horaire en début d’après midi…
L’équipe d’anesthésie prend alors la décision de transférer la jeune patiente intubée en salle de surveillance post-interventionnelle afin de gagner un peu de temps. Elle est installée dans un poste dédié, elle est monitorée, elle est branchée au respirateur et les transmissions sont faites rapidement. Il n’y a aucune problématique particulière, si ce n’est une extubation à réaliser car les antalgiques ont été administrés de manière précoce. Le professionnel d’anesthésie repart rapidement vers la salle d’intervention pour endormir le patient suivant.
En amenant le patient suivant, il apprend que la jeune fille a fait un épisode de désaturation sévère peu de temps après son départ en salle d’opération. On l’a retrouvé non branchée au ventilateur et le moniteur a déclenché pour alarme basse de saturation en oxygène – on a noté une valeur de 67% - sans s’être déclenché plus tôt (alarme basse réglée à 95%).
Bien qu’il n’y ai eu aucune conséquence pour la jeune malade, cet incident trouble le professionnel d’anesthésie et il se remémore ses gestes : il pense avoir branché la patiente au respirateur, mais dans la précipitation n’est plus certain. Il se souvient bien en revanche d’avoir inhibé les alarmes du moniteur multiparamètres pour éviter qu’il se mette en alarme (arrêt de 3 mn). L’infirmière de salle de réveil précise que le ventilateur était en marche, mais que l’alarme de débranchement n’a pas fonctionné. Elle complète son commentaire en disant que cette panne est connue depuis plus de 4 semaines, et que le technicien biomédical contacté par téléphone n’est pas encore venu voir le problème…
Devant cet incident qui aurait pu être très grave, les 2 professionnels décident de rédiger une déclaration conjointe d’Evénement Indésirable sur le logiciel ad’hoc.
La Direction Générale, au vu des conséquences graves potentielles de cet incident, a demandé au Gestionnaire de Risque de procéder à une analyse de cette situation. Le DG souhaite comprendre comment un tel incident a pu se produire alors que les moyens techniques et humains sont mobilisés pour l’éviter.
La méthode ALARM, recommandée par la Haute Autorité de Santé, est retenue.
- Pratiques de soins non conformes
- Utilisation d’un équipement défectueux.
Sur la nécessité de respecter des bonnes pratiques :
Sur la nécessité de respecter la réglementation :
Sur la nécessité de faire évoluer les outils :
Sur la nécessité de faire évoluer les procédures :
Sur la nécessité de faire évoluer les organisations :
Un défaut de prise en charge d‘une patiente avec des conséquences potentielles graves du fait d’une détection tardive.
Dans cette analyse, on constate que plusieurs points de vigilance ont été complétement négligés, et sont de fait à l’origine de l’incident. Et tous les professionnels sont impactés, du paramédical à la DG.
Les systèmes de sécurité des équipements biomédicaux sont indispensables, surtout lorsque l’on s’autorise à travailler en mode très dégradé. Une fois encore, la culture du NO GO doit être valorisée, respectée au sein d’une organisation complexe. La synergie positive d’une équipe passe par cette dynamique.