Madame K, 38 ans, est orientée par son médecin traitant vers un praticien ORL, car cette jeune femme se plaint d’une baisse d’acuité auditive...
Lors de l’interrogatoire, le spécialiste ne retrouve pas d’antécédent de surdité familial. La patiente précise qu’elle a la sensation d’une baisse d’acuité auditive plutôt à droite. Il retient également que la patiente a accouché 4 mois plus tôt.
Le spécialiste pratique un examen clinique complet, qui objective des tympans normaux à l’otoscopie. Il teste également les réactions auditives à l’aide d’un diapason qui retrouvent des signes d’hypoacousie de transmission.
Le bilan audiométrique confirme une surdité de transmission à droite. La baisse auditive est importante. La tympanométrie est normale, avec un réflexe stapédien absent.
Le praticien évoque une otospongiose, qu’il souhaite confirmer par un scanner des rochers. Il est réalisé 3 semaines plus tard et montre des signes en faveur d’une otospongiose du côté droit (zones de foyers otospongieux). Le côté gauche ne montre pas de signe pathologique.
Il propose à cette jeune maman un traitement chirurgical à savoir une stapédectomie avec pose d’un implant en lui expliquant les risques, mais surtout les bénéfices attendus. Cette stratégie thérapeutique est retenue par la patiente.
La consultation d’anesthésie ne retrouve aucune contre-indication à la réalisation d’une anesthésie générale. Cette prise en charge se fera en hospitalisation complète, avec une durée de séjour de 2 jours – 1 nuit.
La patiente est hospitalisée le jour J. Son accueil dans le service d’hospitalisation permet de valider tous les éléments de la préparation pré-opératoire en vue de l’intervention chirurgicale.
Son transfert vers le bloc opératoire est réalisé par un brancardier. A son arrivée, l’infirmière de bloc en charge du programme de la salle d’opération effectue l’entretien pré-opératoire.
La patiente est alors installée en salle d’opération pour bénéficier de l’induction anesthésique, et une fois endormie, elle est mise en position chirurgicale.
Le chirurgien débute l’intervention. Il réalise une incision rétroauriculaire, récline le pavillon vers l’avant, ouvre le conduit externe par l’arrière et accède à la mastoïde et à l’oreille moyenne. Lorsque le chirurgien a une vision large sur la chaîne des osselets, il ne retrouve pas les éléments mis en évidence par le scanner. Il demande les clichés du TDM sur le négatoscope, et demande à relire son observation médicale dans le dossier de la patiente et s’aperçoit alors que le bon côté n’a pas été abordé. Il referme l’incision, et prend la décision d’opérer l’autre côté.
L’intervention se déroule sans incident particulier : l’implant a pu être posé sans difficulté.
La patiente se réveille et constate qu’elle est opérée des 2 côtés. Devant ces demandes d’explications, l’équipe paramédicale de la Salle de Surveillance Post-Interventionnelle prévient le chirurgien en train d’opérer la patiente suivante. Dès l’opération de la patiente suivante terminée, il passe informer la patiente de la situation et parvient à la rassurer sur les suites.
Les suites seront simples, avec une surveillance prolongée. Elle sortira avec deux jours de retard.
Les contrôles audiométriques à distance de l’intervention montreront une récupération à droite de bonne qualité qui permettra d’éviter un appareillage, et des résultats à gauche similaires à ceux enregistrés en pré-opératoire.
Cette erreur de côté a eu comme conséquences :
L’exploitation de la fiche de déclaration d’événement indésirable par le groupe de professionnels chargé de la veille a retenu leur attention : cette erreur de côté questionne les professionnels de santé du COVIRIS qui souhaitent connaitre les raisons qui ont conduit à cet incident, les comprendre et trouver éventuellement des actions de prévention à mettre en place pour éviter que cela ne se reproduise.
Une analyse de risque à postériori est donc réalisée par le gestionnaire de risques de l’établissement.
La méthode ALARM, recommandée par la Haute Autorité de Santé, est retenue pour ce presqu’accident.
Le chirurgien constate l’erreur de côté à l’examen des osselets du côté gauche.
Récupération : c’est le chirurgien qui a détecté cette erreur de côté par l’examen de la chaîne des osselets. Pas de geste agressif sur l’oreille moyenne gauche.
Prévention:
Récupération / Atténuation :
Le partage de l’analyse de l’incident à partir de la méthode ALARM évoque des actions correctrices concernant l’organisation des soins et surtout la communication entre professionnels de santé :
Organisation des soins :
Communication entre professionnels de santé :
Au final, pas de grandes révolutions, mais des points à rappeler, et sur lesquels il convient de communiquer pour faire passer la culture de sécurité à travers la pédagogie de l’erreur.
Cette analyse montre une fois encore que le facteur humain reste au cœur de la gestion des risques.
Prendre le temps de faire un « arrêt sur image » sans apriori pour réaliser un briefing de la situation permet d’identifier les vulnérabilités et de détecter les éléments non conformes aux process de prise en charge.
Il convient de dire et redire que chaque minute accordée à une démarche de gestion de risques est un investissement qui rapporte beaucoup pour les patients. Et en seconde intention aux professionnels de santé car les impacts pour eux sont rarement neutres.
A lire aussi :