Retour d’expérience sur une problématique d’identitovigilance

Tout sur la gestion des risques en santé
                et la sécurité du patient

Retour d’expérience sur une problématique d’identitovigilance

  • Réduire le texte de la page
  • Agrandir le texte de la page
  • Facebook
  • Twitter
  • Messages0
  • Imprimer la page

Analyse d'un cas d'erreur de patient en service de médecine : le patient devait être opéré pour une fibroscopie gastrique, dans le cadre d’un bilan...

  • Paramédical
Auteur : La Prévention Médicale / MAJ : 13/06/2016

Présentation du contexte et de la problématique

Un patient, hospitalisé en service de médecine, doit bénéficier d’une Fibroscopie Gastrique, dans le cadre d’un bilan.

Le brancardier qui doit effectuer le transfert entre le service et le plateau technique s’adresse à l’une des infirmières du service, qui lui dit que le patient est dans la chambre XXX, côté fenêtre.

Le brancardier prend en charge un patient et le descend pour la réalisation de cet examen. Lors de cette gastroscopie sans anesthésie, le praticien constate que le malade n’est pas à jeun (estomac plein). Il appelle alors le service, furieux que le protocole de préparation ne soit pas respecté.

L’infirmière, jointe au téléphone, manifeste son étonnement car elle sort de la chambre dudit patient, qui est toujours présent. Le praticien précise qu’il a lui-même vérifié l’identité du patient. Il demande alors à l’infirmière de vérifier une nouvelle fois.

L’infirmière vérifie et peut affirmer que le patient qui devait bénéficier de cet examen est toujours là.

C’est à cet instant que l’on comprend que l’on a fait une erreur de patient.

Le malade présente, dans les heures qui suivent le geste, une désaturation modérée (90-92%), mais qui fait évoquer un syndrome de Mendelson. Son hospitalisation en Unité de Surveillance Continue est décidée ; elle durera 4 jours et une antibiothérapie est prescrite au vu des images pulmonaires.

Les suites sont simples pour le patient, sans suite particulière.
 

Analyse succincte de cette problématique

La procédure de vérification de l’identité des patients est automatique dans ce plateau d’Explorations Fonctionnelles. Aucun examen n’est pratiqué sans cet ultime contrôle.

Comment a-t-on pu réaliser un geste technique à un autre patient ?

Une analyse de risque a posteriori est donc décidée, pour comprendre les mécanismes de cet événement indésirable grave.

Voici le résumé de ses conclusions, avec la mise en évidence de facteurs contributifs.

Facteurs contributifs

Facteur environnemental :

Le service de médecine en question comprend deux secteurs distincts dans la répartition des patients : l’infirmière qui a renseigné le brancardier n’était pas en charge du patient et l’information a été donnée au vu de la planification murale, information exacte par ailleurs.

Facteur tâches à effectuer :

Le brancardier est passé au moment où les infirmières étaient occupées à gérer 4 sorties et 2 entrées de façon concomitante, pour accueillir des malades en attente au sein du service des urgences depuis le milieu de la nuit précédente.
Il a oublié le dossier du patient dans le service.
L’examen a été réalisé par le praticien sur la seule demande, sans avoir vérifié l’histoire de la maladie du patient.

Facteur travail en équipe :

Aucune infirmière n’a pris le temps d’accompagner le brancardier auprès du patient et de vérifier avec lui l’identité du malade.

Facteur individuel :

Le brancardier s’est trompé de chambre de façon inexpliquée ; lors de son entretien, il n’explique pas cette défaillance.
De plus, il n’a pas vérifié l’identité du patient avant de le prendre en charge. Il aurait constaté que le malade n’avait plus de bracelet d’identification, enlevé par le patient et déposé sur la table de chevet.
A son arrivée au plateau technique, l’identité du patient a été vérifiée à 2 reprises selon les explications de l’équipe : une fois par l’infirmière, une fois par le médecin qui a réalisé l’examen. La question posée : « vous êtes bien M. XX ?? » (question orientée).
Le patient présente un syndrome dépressif récent, avec un traitement chimique en phase d’équilibration, qui, associé à la prémédication, ne lui permet pas de réaction critique.

Facteur institutionnel :

L’établissement possède une procédure de vérification d’identité : à l’entrée du patient avec sa carte d’identité, édition d’étiquettes, mise en place d’un bracelet d’identification.
Son évaluation n’est pas organisée.

Facteur organisationnel :

Le programme d’endoscopie du jour avait près de 30 minutes de retard et l’on a demandé à l’ensemble des intervenants « de ne pas traîner pour ne pas perdre plus de temps ».
La constitution des équipes est habituelle.

Le brancardier n’a aucun document lui permettant de justifier l’identité du patient.

Gestion des patients :

C’est l’infirmière du plateau technique qui donne le « GO » au brancardier pour aller chercher le patient suivant.
Le service du patient n’a pas été prévenu de l’arrivée du brancardier par le plateau technique.

En résumé :

  • Une charge de travail dense dans le service au moment de la prise en charge du patient par le brancardier.
  • L’accompagnement du brancardier lors de cette prise en charge n’a pas été jugé nécessaire (du fait de la charge de travail), car ce professionnel était reconnu de tous comme très compétent dans son domaine.
  • La procédure de vérification d’identité existe, mais n’a pas été respectée : bracelet d’identification.
  • Le facteur temps à prendre en compte : le retard pris dans le programme d’endoscopie et la manifestation du mécontentement du praticien qui génère un stress et un non respect des procédures de base.
  • Un examen réalisé sans présence du dossier du patient, simplement au vu de la demande (bon).
  • Le contexte particulier du patient et de son traitement en cours : personne n’a pris en compte cette donnée lors de son interrogatoire.
  • La forme de la question posée lors de la vérification d’identité : question fermée.
  • L’absence d’une alerte entre plateau technique et service signalant le « GO » pour acheminer le patient vers son lieu d’examen.

Les pistes de réflexion et/ou d'amélioration

Cet incident grave a marqué les équipes de soins.

Leur participation à cette analyse a été exemplaire et ils ont exprimé des attentes fortes en matière de préconisations.

Les procédures ont été relues, légèrement modifiées et surtout réexpliquées à tous les métiers concernés :
- procédure d’appel du patient : le plateau technique devra prévenir le service lors du « GO » donné au brancardier pour aller chercher le patient. Cela permet aux équipes de vérifier une dernière fois la bonne préparation du malade, de préparer le dossier et de minimiser les pertes de temps.
- procédure de vérification d’identité : une nouvelle explication est donnée quant au bien fondé de cette procédure. Chaque point est confirmé. Un ajout néanmoins dans la procédure, et surtout une action pédagogique sur la question à poser au patient : question ouverte, à savoir « comment vous appelez-vous ? et « pouvez-vous m’épeler votre nom ? ».
- procédure de réalisation d’un examen : avec la présence obligatoire du dossier.

Enfin, une Revue de Morbi Mortalité a été organisée au sein de l’établissement, avec l’accord des personnels concernés, pour permettre un « retour d’expérience aux collègues ».

A lire aussi :

Retour d'expérience : défaut d'identitovigilance et confusion

0 Commentaire

Publier un commentaire