Erreur de voie d'administration

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Erreur de voie d'administration

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Madame F., 54 ans, présente une crise comitiale en fin de journée, lors du trajet travail-domicile, dans le bus qui la ramène à proximité de son logement. Elle est confiée au service d’urgences de proximité, amenée par les sapeurs-pompiers.

  • Paramédical
Auteur : Bruno FRATTINI / MAJ : 03/01/2017

Le contexte

  • Le médecin urgentiste, après un examen clinique orienté neurologique et un interrogatoire précisant les événements des dernières semaines, retrouve quelques troubles sensitifs de l’hémicorps. Il insiste auprès du service d’Imagerie pour obtenir un scanner cérébral rapidement.
  • Cette patiente présentait des céphalées depuis plusieurs semaines. Quelques nausées et vomissements apparus depuis quelques jours complétaient le tableau clinique.
  • L’examen d’imagerie en coupe retrouve une tumeur intracrânienne, vraisemblablement un méningiome de la convexité du crâne.
  • L’urgentiste propose à la patiente une hospitalisation en Unité d’Hospitalisation de très Courte Durée, afin de la surveiller en milieu hospitalier du fait de l’heure tardive. Un neurochirurgien de l’établissement de santé viendra la voir le lendemain. Ce dernier demandera également une Imagerie par Résonance Magnétique qui confirmera le caractère bénin de la tumeur.
  • Un bilan ophtalmologique est également demandé et ne montre pas d’altération de la vision.
  • Du fait du tableau clinique évoqué et de la taille importante de la tumeur, un traitement chirurgical de celle-ci est proposé, expliqué à la patiente. Cette dernière accepte et l’intervention est programmée à 15 jours. Une consultation d’anesthésie est également réalisée et cette dernière ne met pas en évidence de contre indication au traitement proposé, car Mme F. ne présente aucune pathologie associée.
  • Le jour de l’intervention, la patiente est installée en Salle d’Opération ; elle bénéficie d’un monitorage invasif, pression artérielle sanglante, posé préalablement sous anesthésie locale, dans le but de gagner un peu de temps entre l’induction et l’incision chirurgicale.
  • Le narcotique retenu est le Thiopenthal*. Lors de son injection, la patiente se plaint de vives douleurs au niveau de l’avant bras Gauche. L’équipe d’anesthésie s’aperçoit alors que la voie utilisée est la voie artérielle.
  • L’induction est finalement terminée, la patiente est stabilisée. La décision de changer la voie artérielle est prise. L’intervention neurochirurgicale se déroule sans problème, avec des suites simples.
  • Malheureusement, la patiente présentera dans les suites de son injection artérielle une nécrose de la main, et malgré plusieurs interventions chirurgicales plastico-orthopédiques, elle sera amputée de l’index et du majeur, et le pouce restera bloqué.
  • L’équipe d’anesthésie signale cet incident comme Evénement Indésirable Grave. Son analyse a permis de rendre les conclusions suivantes.

Conséquences

Cette malade demande une indemnisation dans le cadre d’une procédure civile car bien que les suites du traitement chirurgical de la tumeur intracrânienne aient été simples sans aucune séquelle neurologique, la patiente a subi un grave préjudice :
- plusieurs interventions chirurgicales de chirurgie plastique et reconstructrice et d’orthopédie,
- une prolongation d’hospitalisation lors de son premier séjour,
- plusieurs autres séjours en lien avec les reprises chirurgicales,

Analyse des causes

La méthode ALARM, recommandée par la Haute Autorité de Santé, est retenue.

• Causes immédiates
Erreur de voie d’administration d’un médicament d’anesthésie : provoquant des séquelles graves, nécessitant plusieurs interventions chirurgicales.

Analyse des barrières

• Barrière de récupération et d’atténuation : Barrière qui a arrêté l’incident :
o C’est la plainte de la patiente qui a exprimé une douleur au niveau du membre supérieur qui a arrêté l’injection en cours. Elle n’a pas eu toute la dose de Penthothal*.

• Barrières qui n’ont pas fonctionné :
o Pas d’étiquetage des différentes voies d’administration : dans le cas présent, la patiente était porteuse d’une voie veineuse périphérique, d’une voie veineuse centrale et d’une voie artérielle. Aucune étiquette, avec code couleur, n’était en place pour identifier les différentes voies d’abord.

Les pistes de réflexion et / ou d’amélioration identifiées

L’analyse de cette situation a conduit les professionnels à réfléchir sur les points suivants :
- la rédaction d’un protocole, pour corriger ce type d’accident, est réalisée,
- l’achat des étiquettes pour identifier les différentes voies d’abord est acté par la Direction Générale.
- l’identification des voies d‘abord est décidée dès que 2 voies d’abord différentes sont posées aux patients.
- En revanche, cette thématique n’est pas inscrite dans les actions de formation de simulation en santé, car la probabilité de survenue est très faible, et l’identification des voies d’abord doit permettre d’éviter un nouvel accident.

Conclusion / Enseignements

Les conséquences pour cette femme jeune sont très importantes sur sa vie au quotidien, même si cet accident n’a pas impacté son pronostic vital. L’utilisation de la main Gauche est fortement dégradée pour cette droitière, ainsi que les impacts esthétiques qui sont majeurs.
Les fondamentaux de sécurité des soins ne doivent jamais être minimisés ou oubliés.
Dans tout système complexe, où plusieurs métiers différents interviennent pour une même finalité, le respect des prérogatives de chacun est essentiel pour maintenir un niveau de sécurité optimal. Aucun métier n’est plus important qu’un autre. Ce respect des compétences de chacun permet un fonctionnement avec plus de sérénité.

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