Bien communiquer avec le maître de l’animal de compagnie

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Bien communiquer avec le maître de l’animal de compagnie

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La communication est parfois perçue comme un effet de mode. Elle est néanmoins bien mieux que cela. La communication interpersonnelle est en effet, plus que jamais, un élément fondamental du classique contrat tacite de soins lors de la consultation du vétérinaire.

Auteur : Dr Michel Baussier, Vétérinaire / MAJ : 23/06/2020

Introduction

En médecine vétérinaire où le patient animal n’est pas juridiquement partie au contrat de soins, le praticien contracte avec le propriétaire ou le détenteur de l’animal. C’est celui qui est, sur le temps long, le gardien juridique de l’animal. Il est en tout cas le client du vétérinaire.

Ici, nous l’appellerons le maître de l’animal, ce qui nous paraît correspondre le mieux au rapport avec l’animal dans le cadre du processus millénaire de la domestication. Il faut cependant avoir conscience que l’animal de compagnie, compte tenu de l’anthropomorphisation en vogue, est souvent considéré, quoi qu’on puisse en penser, comme membre de la famille : il est en quelque sorte un animal-enfant.

Bases juridiques

Une première forme ou composante de la communication est l’information, laquelle est visée par le droit.

Le code de déontologie vétérinaire, en libéralisant en 2015 la communication, s’est beaucoup attaché, sous des aspects qualitatifs et quantitatifs, à l’information donnée au maître de l’animal tendant à la protection de ses intérêts et de ceux de son animal. Les vétérinaires n’avaient pas forcément en tête l’évolution de ce volet de la communication. Il est question de « toute la clarté nécessaire » des recommandations et conseils donnés. « Toutes les explications utiles sur le diagnostic, sur la prophylaxie ou la thérapeutique instituée et sur la prescription établie » doivent être formulées.

Dans un but : recueillir un consentement qui soit véritablement éclairé. Mais l’important n’est pas d’arracher par tout moyen un consentement à l’acte, l’important est d’informer, ce qui aura pour effet le bon éclairage du consentement qui deviendra alors une conséquence naturelle et partenariale de cette information convenablement donnée, c’est-à-dire donnée en toute transparence et franchise.

La jurisprudence liée à la responsabilité civile est allée dans le même sens. L’information était sans doute déjà implicitement contenue dans la notion de soins attentifs mais le juge a eu l’occasion de rappeler la nécessité de cette information à donner tout au cours du contrat tacitement scellé. Surtout il a fait de l’information précontractuelle un élément fondateur de ce contrat, imposant même la charge de la preuve de l’information donnée au praticien.

En tout état de cause, quel que soit l’état du droit, l’évolution de notre société et des rapports humains - l’accès à Internet et aux réseaux sociaux ajoutant -  a imposé au vétérinaire cette nécessité de considérer aujourd’hui avec grande attention sa relation au maître de l’animal qu’il soigne.

Les buts

Les buts d’une bonne information du maître de l’animal et plus largement d’une relation de qualité entre le maître et le praticien sont d’abord l’efficacité des soins apportés à l’animal, laquelle efficacité est indissociable du consentement bien éclairé du maître aux soins prodigués à son animal.

En définitive, dans le contrat de soins avec le maître en tant que client, c’est sa satisfaction qui est recherchée. Le praticien doit en effet répondre à ses attentes, tant celles explicitement formulées que ses attentes implicites, à détecter et comprendre. Pour le maître, l’expérience des soins doit être une expérience positivement vécue.

Les buts ultimes sont la prévention des événements indésirables graves au cours des soins et de la crise relationnelle consécutive (mise en cause du vétérinaire, conflit et litige).

Les moyens

Les moyens de la bonne communication sont nombreux et, sous des apparences simples, ils sont en réalité complexes. Il y a en effet le dit et le non-dit, le verbal et le non-verbal. La communication non verbale, celle - très physique et empathique - qui passe par l’expressivité des visages, la gestuelle, les attitudes et comportements, le sourire, la chaleur de la voix, est assurément la plus importante.

Tout commence avec l’accueil. C’est d’abord la fameuse question du sourire au téléphone. Il est fait d’écoute, de sobriété sécurisante, de gentillesse tout simplement. Puis c’est la première impression en entrant dans l’établissement qui va énormément compter: l’ambiance générale, la propreté bien sûr. Question d’atmosphère.

La qualité du contact humain est l’affaire du vétérinaire mais aussi de son équipe.

La consultation est le moment clé et notamment, au cours de celle-ci, le temps de la contention et de l’examen clinique de l’animal est primordial. La communication avec le maître passe évidemment pour le vétérinaire par celle avec l’animal. Il sera observé et jugé sur ses manières de faire avec l’animal-enfant, lui-même traité comme enfant-roi. L’impression d’écoute, de maîtrise, d’observation et d’attention donnée est un élément important de la confiance, base fondamentale de la communication.

Dans une médecine vétérinaire partenariale – qui privilégie par essence la communication – le vétérinaire décrit et explique ce qu’il voit, ce qu’il constate, ce qu’il fait. Il le fait avec des mots simples. Il interroge le maître, il lui demande son avis. Ses questions sont ouvertes.

Le diagnostic est expliqué en termes simples. Le praticien n’hésite pas à ce stade à s’aider de moyens complémentaires, d’outils pédagogiques : des dessins, des schémas, des planches anatomiques, des posters, des maquettes en 3D, l’écran de son ordinateur… Le matériel audiovisuel est ici parfois précieux pour compléter ou relayer l’explication orale… Certains sites internet, à commencer par celui de la propre clinique du praticien ou d’autres établissements de soins vétérinaires, peuvent être utiles.

Le traitement comporte souvent plusieurs options thérapeutiques. Il convient de les présenter toutes, s’il le faut en les hiérarchisant. La décision finale appartient au maître, éclairé par son vétérinaire.

Dès lors les recommandations, conseils et prescriptions s’accompagnent d’explications et instructions claires, structurées et concises.

L’écrit vient alors en complément de l’oral. Les ordonnances, claires et lisibles, aujourd’hui souvent imprimées, répondent aux exigences de la loi et de la réglementation. Elles s’ajoutent souvent à des comptes rendus écrits d’examens, d’opérations. Des recommandations ou conseils écrits et personnalisés complètent si nécessaire ces documents.

Le contrat de soins écrit peut dans certains cas utilement compléter cette information orale puis écrite. Il scelle en quelque sorte un consentement dûment éclairé. Mais il perd une grande partie de son utilité réelle dès lors que l’établissement a mis sans ambiguïté à la disposition de son client, maître de l’animal, comme il le doit réglementairement et déontologiquement du reste, les conditions générales de fonctionnement de son établissement de soins vétérinaires (CGFESV).

Les CGFESV constituent aujourd’hui une pièce maîtresse de l’information donnée, elles sont un outil remarquable de communication que les praticiens devraient apprendre dans tous les cas à valoriser pour le bénéfice de tous, sans oublier le leur ! 

Le suivi de l’acte, en vue notamment de son évaluation, fait partie maintenant du contrat de soins. Il peut passer, ainsi que les actes de prévention, par l’instauration de contacts téléphoniques, de relances par sms et autres moyens.

Bien communiquer avec le maître de l’animal, c’est d’abord bien l’informer mais c’est bien plus que cela. Ce n’est pas simplement une mode, c’est la manière incontournable d’une médecine partenariale, moderne, efficace, valorisante pour tous, où chacun joue gagnant-gagnant.

Références

  1. ASSIÉ P. – Le devoir d’information du médecin : une responsabilité extensive …et étendue. Experts, n° 97, août 2011.
  2. FONTENELLE N. – Quelles sont les obligations en matière d’information ? La semaine Vétérinaire, n° 1381, 20 novembre 2009.
  3. GREPINET A. – Informer le client. Une obligation devenue paroxystique. L’Essentiel, n° 291, 2 mai 2013.
  4. JACOTOT D. – Information du patient : deux décisions de la Cour de cassation. La lettre (CNOCD), n° 16, avril 2003.
  5. JACOTOT D. – Dossier médical. Quand le juge délivre un message sur l’information du patient. La Lettre (CNOCD), n° 27, mai 2004.
  6. JACOTOT D. Condamnation pour faute. Quand le juge sanctionne l’information déraisonnablement optimiste. La Lettre (CNOCD), n° 30, septembre 2004.
  7. JACOTOT D. – Comment l’inexécution de l’obligation d’information est-elle sanctionnée ? La Lettre (CNOCD), n° 60, septembre 2007.
  8. JACOTOT D. – Le manquement à l’obligation d’information entraîne désormais réparation systématique. La Lettre (CNOCD). N° 90, septembre 2010.
  9. PORRET CONDAMINE C. – Comment bien communiquer avec le propriétaire lors de complication. Colloque AFVAC Arras Rien ne va plus avec le propriétaire. 13 octobre 2019.
  10. RICHIARDI E. – La faute professionnelle du vétérinaire praticien. Thèse de doctorat vétérinaire, Toulouse, 2011.
  11. SARGOS P. – La révolution éthique des codes de déontologie des professions médicales et ses conséquences juridiques et judiciaires. Recueil Dalloz, 2007, n° 12.
  12. TARTERA Ph. – Un vétérinaire condamné pour défaut d’information. Le Point Vétérinaire, N° 266, juin 2006.
  13. THUAL F.- Il est temps de réveiller le management en clinique vétérinaire. La Semaine Vétérinaire, n° 1818-1819, 23 et 30 août 2019.
  14. WHITING M. et al – A survey of veterinary clients’perceptions of informed consent at a referral hospital. Vet Rec, 13/10/2016.

Lien utiles 

Vers le site du Conseil national de l’Ordre des vétérinaires :

> Code de déontologie commenté : https://www.veterinaire.fr/la-profession/la-reglementation/le-code-de-deontologie-commente.html

> Conditions générales de fonctionnement des établissements de soins vétérinaires (CGFESV) : https://www.veterinaire.fr/fiches-pratiques/fiches-pratiques-veterinaire/les-conditions-generales-de-fonctionnement-des-etablissements-des-soins-veterinaires-cgfesv.html

> Consentement éclairé : https://www.veterinaire.fr/fiches-pratiques/fiches-pratiques-veterinaire/le-consentement-eclaire-et-le-contrat-de-soins.html

> Consentement éclairé : https://www.veterinaire.fr/fiches-pratiques/fiches-pratiques-veterinaire/le-consentement-eclaire.html

Vers le site de la Prévention médicale :

> Prévention des complications avec le maître : https://www.prevention-medicale.org/Cas-clinique-et-retours-d-experience/Tous-les-cas-cliniques/Veterinaire/prevenir-complications-avec-maitre-animal

> Prévention du drame relationnel : https://www.prevention-medicale.org/Formations-et-evenements/grand-angle-en-sante/La-bientraitance-de-l-animal-et-de-son-maitre/bientraitance-animal

> Prévention du drame relationnel :https://www.prevention-medicale.org/Actualites-et-revues-de-presse/Toutes-les-actualites/Veterinaire/prise-charge-animal-maitre

Vers le site de la MACSF :

> L’écrit :https://www.macsf.fr/Responsabilite-professionnelle/Cadre-juridique/responsabilite-veterinaire-ecrit