Grand Prix 2023 de la Prévention Médicale : Dr Malcie Mesnil pour son défi "Perfusion pour un champion"

Tout sur la gestion des risques en santé
                et la sécurité du patient

Grand Prix 2023 de la Prévention Médicale : Dr Malcie Mesnil pour son défi "Perfusion pour un champion"

  • Réduire le texte de la page
  • Agrandir le texte de la page
  • Facebook
  • Twitter
  • Messages0
  • Imprimer la page
  • Logo du Grand prix 2023 - La Prévention Médicale

Le Dr Malcie Mesnil remporte le premier prix pour "Perfusion pour un champion", une formation par la simulation in situ pour prévenir le risque infectieux lié aux voies veineuses périphériques (VVP). 

Auteur : La Prévention Médicale / MAJ : 15/12/2023
Dr Moll, Pr Amalberti, Dr Mesnil, Mme Daoud

 

À propos de la lauréate du 1er Prix de la Prévention Médicale

Le Dr Malcie Mesnil, anesthésiste-réanimatrice, a travaillé 10 ans à la Fondation Rothschild en réanimation neurochirurgicale avant de se tourner vers la prévention du risque infectieux et d’occuper le poste de médecin référent Covid durant la pandémie.  

Elle a rejoint l’Hôpital national des Quinze-Vingts à Paris en mai 2023 en tant que Coordinatrice de la Gestion des Risques Associés aux Soins et de la Prévention du Risque Infectieux, où elle travaille également au déploiement de la formation par la simulation en santé.

Grand Prix de la Prévention Médicale 2023

Dr Mesnil, qu’est-ce qui vous a motivée à développer cette initiative ? 

Les infections liées aux cathéters sont des infections rares mais elles peuvent être graves et entraîner des bactériémies (passage de bactéries dans le sang) avec des translocations bactériennes secondaires (endocardites, spondylodiscites, abcès cérébraux…). 

La prévention des infections liées aux cathéters fait d’ailleurs partie des axes promus par la nouvelle Stratégie Nationale de Prévention des Infections et de l’antibiorésistance (2022-2025).

J’ai par ailleurs constaté que les dernières recommandations émises par la Société Française d’Hygiène Hospitalière (SF2H) en 2019, étaient encore imparfaitement connues dans l’établissement.

Grâce au dynamisme du réseau de correspondants en hygiène, l’Hôpital national des Quinze-Vingts a participé à l’audit national sur les conditions de pose des voies veineuses périphériques (VVP) en 2022 et 2023 (Observa4, réseau SPIADI).

Les résultats de cet audit ont fait ressortir des non-conformités concernant la réalisation de l’hygiène des mains, le port de gants ou le choix des antiseptiques, en particulier : 

  • à peine 18 % de conformité aux deux étapes désinfection des mains requises dans la séquence de soin,
  • seulement 31 % d’enfilage des gants avec la bonne temporalité. 
     

Ces résultats m’ont conduite à proposer une formation destinée à prévenir le risque infectieux, spécifiquement ciblée sur ces non-conformités par la simulation in situ

Pourquoi avoir choisi la formation par la simulation in situ

L’approche par la simulation in situ nous a semblé pertinente dans la mesure où elle permet, grâce à l’utilisation de matériel spécifique, de la réalité virtuelle et au recours à un patient standardisé, au sein même de l’environnement de travail :  

  • de reproduire des situations ou des environnements de soins,
  • d’enseigner des procédures diagnostiques et thérapeutiques,
  • de répéter des processus, des situations cliniques ou des prises de décisions, seul ou en équipe.
     

Il faut savoir que la pose de VVP est une séquence de soin relativement complexe. Grâce à cette méthode, les apprenants s’exercent et progressent dans un milieu protégé, tout en bénéficiant du droit à l’erreur sans conséquence clinique.  

Quels sont les objectifs visés par la formation Pose VVP par simulation ? 

Nous visons 4 objectifs :  

  1. Limiter le risque infectieux lié à la pose de VVP en améliorant les conditions d’asepsie, les techniques et la traçabilité des VVP, et contribuer ainsi à améliorer la sécurité des soins. 
  2. Mettre à jour les dernières recommandations de la SF2H.
  3. Améliorer la visibilité de la nouvelle Equipe de Prévention du Risque Infectieux (EPRI) de l’hôpital des Quinze-Vingts, en cours de reconstitution. 
  4. Promouvoir le rôle des correspondants en hygiène de l’établissement.  
     

Quel est le public concerné par la formation ? Quels sont les prérequis ? 

La formation concerne un public large et, en pratique, tout soignant qui peut être amené à perfuser : les infirmières (élèves et IDE), les infirmières anesthésistes (élèves et IADE), les médecins (anesthésistes-réanimateurs en particulier), les manipulateurs de radiologie… 

Quant aux prérequis, il suffit d’être volontaire et d’avoir déjà perfusé, l’objectif n’étant pas d’apprendre à poser une VVP mais de s’améliorer. 

Les services concernés dans notre établissement sont les urgences, l’hospitalisation, l’imagerie, le bloc et le centre d’investigation clinique (CIC).  

Des sessions de formation seront également proposées spécifiquement aux équipes de nuit.

Quelle est la fréquence et le déroulement d’une séance de formation VVP Simulation ? 

La formation est délivrée à raison d’une séance par mois, avec un service différent lors de chaque séance. 

La formation se déroule en 5 temps, selon le schéma ci-dessous  : 

Grand Prix de la Prévention Médicale 2023

 

Au début de la journée de formation, l’équipe de formateurs (a minima 5 personnes du groupe), installe : 

  • une patiente simulée, "Mme Labotest", dans une chambre du service, réquisitionnée pour l’occasion ;
  • le nécessaire pour la formation théorique, le plus souvent en salle de pause du service.
     

En collaboration avec l’encadrement du service, la formation est intégrée dans la journée "ordinaire" de l’apprenant. 

Le scénario est simple : l’apprenant est sollicité par le médecin facilitateur qui lui demande d’aller perfuser Mme Labotest avant son passage au bloc. Charge à lui de préparer son matériel et de poser une perfusion à la patiente, qui n’a pas été informée du geste et va logiquement demander des explications. Il a la possibilité de vérifier la prescription et de tracer son acte dans le plan de soin (pose de VVP et surveillance). 

Après cette première pose, l’apprenant est invité à rejoindre la salle de formation où il est accueilli par les formateurs qui vont lui proposer  :

  • de répondre à un auto-questionnaire où figurent l’ensemble des étapes qui auraient dû être respectées, et des questions "bonus" concernant les nouvelles recommandations de la SF2H (utilisation de l’alcool à 70° pour la gestion des valves, durée maximale de maintien d’une VVP). Le questionnaire peut être rempli directement sur un smartphone, via un QR code, et dure environ 4 minutes ;
  • de réaliser une formation à l’hygiène des mains avec une solution hydro-alcoolique phosphorescente et une lampe UV qui permettent de mettre en évidence les zones où la solution n’a pas été correctement appliquée, afin de réviser les 7 étapes nécessaires à une bonne désinfection ;
  • de participer à une activité ludique visant à reconstituer toutes les étapes de la séquence de soin ;
  • d’échanger avec l’équipe afin d’obtenir des explications aux potentielles erreurs ou oublis de l’auto-questionnaire.
     

L’apprenant reprend ensuite son activité clinique. 

Un peu plus tard, il est à nouveau sollicité par le médecin facilitateur pour reposer une perfusion à Mme Labotest qui l’a accidentellement arrachée. Il retournera auprès de la patiente pour une nouvelle séquence de perfusion et sera accompagné cette fois-ci par un "expert en perfusion" (formateur infirmier anesthésiste) qui lui donnera quelques conseils pour devenir un "champion de la perfusion". 

Après la seconde pose, l’apprenant est à nouveau invité à répondre à l’auto-questionnaire et voit sa formation validée. Il lui est enfin demandé de répondre à un questionnaire de satisfaction. 

Quelle est la composition de l’équipe de formation ? 

L’équipe est composée de 9 personnes de profils variés avec, pour chacune, des missions bien spécifiques : 

  • Un médecin, pilote du projet, chargé de la coordination et de l’animation (médecin facilitateur).
  • Une ingénieure qualité (copilote) qui a élaboré le questionnaire d’auto-évaluation et assiste les apprenants pour leur remplissage ; elle participe également à la formation.
  • Une cadre de santé hygiéniste chargée d’animer des séances de formation et de rappeler les bonnes pratiques.
  • Un infirmier anesthésiste chargé d’apporter l’expertise technique de perfusion.
  • Une IDE correspondante hygiène qui co-anime les séances.
  • Une faisant fonction de cadre de santé qui planifie les séances avec les cadres et qui endosse de rôle de patiente simulée.
  • Un cadre de santé hospitalisation chargé de coordination avec l’encadrement et d’animer des séances.
  • Un chargé de communication pour le volet informatif (programmation des séances, création d’affiches, gestion des "goodies ").
  • Un manipulateur radio qui anime des séances. 
     

Comment mesurez-vous l’impact de la formation ? 

Nous avons fixé 5 indicateurs de suivi : 

  1. Le taux de progression moyen des apprenants qui mesure le ratio entre le taux de conformité obtenu avec l’auto-questionnaire avant et après la séance.
  2. L’amélioration des critères de non-conformité (Audit national OBSERVA4 2024) relatifs aux 2 temps d’hygiène des mains et à la temporalité de l’enfilage des gants.
  3. Le nombre de participants par séance.
  4. Le ratio de personnel éligible formé par service.
  5. Le taux de satisfaction des apprenants et des formateurs.
     

Quel est le planning de diffusion de la formation ?

Le projet a démarré en octobre 2023, et nous avons déjà réalisé 3 séances : dans le service de chirurgie ambulatoire en octobre, aux urgences en novembre et en hospitalisation conventionnelle en décembre. De nouvelles séances sont programmées dans le service d’imagerie en janvier 2024, et au bloc opératoire en février. 

Quelques indicateurs sont d’ores-et-déjà disponibles : 

  • Entre 7 et 9 apprenants ont été formés par séance (7,8 en moyenne).
  • Le taux de progression moyen des apprenants est de + 34 %.
  • Les taux de satisfaction moyens sont de 9,2/10 pour les apprenants et 8,6/10 pour les formateurs. 
     

La véritable évaluation de l’efficacité de la formation se fera au décours de la participation au nouvel audit Observa4 en 2024. 

À ce jour, l’accueil des différents services a été très agréable et les séances ont par ailleurs été l’occasion de faire se rencontrer des professionnels de différents profils, avec des échanges enrichissants à la clé.  

En conclusion, au-delà de mener à bien notre planning prévisionnel, ce projet, simple et potentiellement efficace, pourrait devenir pérenne dans l’établissement et être proposé régulièrement aux soignants en poste dans l’établissement, comme aux nouveaux arrivants.  

"La simulation est aujourd’hui une méthode incontournable en matière de gestion des risques en ce qu’elle permet au professionnel de s’entraîner sans risque au plus près du soin. En l’occurrence, la pose d’une VVP est un acte courant mais très exposé au risque infectieux. S’entraîner régulièrement en toute sécurité pour le patient est certainement un gage d’amélioration des pratiques" indique Marie-Christine Moll, Directrice scientifique de la Prévention Médicale

 

Découvrez les autres projets primés