Revue de presse - Octobre 2020

Tout sur la gestion des risques en santé
                et la sécurité du patient

Revue de presse - Octobre 2020

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Retrouvez l'analyse de la presse internationale sur le risque médical par le Professeur Amalberti . A la une ce mois-ci : "Comment mieux aider les difficultés émotionnelles des soignants pendant le Covid ?", "La chirurgie bariatrique aux Etats-Unis", "Le suivi et le dépistage des cancers en France par la médecine générale", "La réaction de la médecine espagnole face à l’expérience espagnole Covid-19"...

Auteur : Pr René AMALBERTI, Docteur en psychologie des processus cognitifs, ancien conseiller HAS / MAJ : 08/10/2020

Comment mieux aider les difficultés émotionnelles des soignants pendant le Covid ?

Les professionnels de la santé ont été très impactés psychologiquement par le Covid :

  • par leurs patients qui allaient mal ;
  • pour eux-mêmes en termes de sur-risque médical, mais aussi par la difficulté à travailler, le manque d’équipement et d’organisation ;
  • par le sur-risque pour leurs familles.

Cet article co-écrit par un des meilleurs spécialistes mondiaux du médecin comme seconde victime et du burn-out (Alberti Wu) est le résultat d’un consensus d’experts.

Ces experts ont identifié plusieurs priorités pour les solutions à mettre en place afin de réduire l’anxiété des professionnels de santé.

Ces priorités sont rangées selon une hiérarchie de besoins (des principes de bases aux optimisations), en adoptant l’esprit de la pyramide de Maslow :

  1. La première priorité absolue est la protection : ne pas devenir malade par son travail. En garantissant notamment la disponibilité des protections (masques, blouses, gants, etc).
  2. La seconde priorité recouvre les besoins de base journaliers : transports pour venir travailler, parking disponibles, écoles ouvertes et garde des enfants, facilité à trouver des commerçants pour les besoins journaliers.
  3. La troisième priorité est la qualité du Leadership et de la communication de crise. Les professionnels attendent beaucoup de leur manager dans ces situations de crise pour connaître l’état réel du monde, sans masquage, sans fake news, et un maintien du lien d’information avec son actualisation dans des termes simples aussi fréquents que possible.
  4. La quatrième priorité est l’aide mentale pour un bien-être émotionnel : encourager le personnel médical à verbaliser ses craintes, ses difficultés, à créer de l’écoute, à partager.
  5. La cinquième priorité est en lien avec l'éthique : notamment la réalité et les explications collectives sur des patients exclus de certains traitements.
  6. La sixième priorité doit favoriser le bien-être. L’organisation par les institutions de séances - même courtes - d’aides psychologiques, de yoga, de méditation ou autres techniques peut s’avérer très utile pour réduire beaucoup de tensions. Autre point important, le regard collectif pour éviter un laisser-aller excessif (vestimentaire, alimentaire) et la pratique réelle de moments de break, de pauses dans l’activité...
  7. La septième et dernière priorité est le souci de dire merci, la gratitude des managers, qui doit être augmenté dans ces périodes difficiles.

Wu, A. W., Buckle, P., Haut, E. R., Bellandi, T., Koizumi, S., Mair, A., ... & Newman-Toker, D. (2020). Supporting the Emotional Well-being of Health Care Workers During the COVID-19 Pandemic.

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L’expérience américaine Covid-19 : le manque critique d’infirmiers déjà avant, et encore plus pendant le Covid

Malgré de nombreuses études indiquant qu'une meilleure dotation en personnel est associée à de meilleurs résultats pour les patients, un seul État américain (la Californie) établit des normes de dotation infirmier/nombre de lits.

Deux autres États américains (New York, l'Illinois) ont cherché dans cette étude à déterminer en quoi les différences de dotation en personnel existant d'un hôpital à l'autre ont - ou pas - des conséquences différentes pour les patients.

La collecte de données a eu lieu juste avant l'épidémie de Covid-19.

L'enquête a été conduite auprès d'infirmières et de patients dans 254 hôpitaux de New York et de l'Illinois entre décembre 2019 et février 2020 avec une mesure de la qualité des soins, de l'expérience des patients et de l'épuisement des infirmiers. Voici les résultats :

  • L’effectif moyen dans les unités médico-chirurgicales varie de 3,3 à 9,7 patients par infirmière, avec la pire dotation moyenne à New York.
  • Plus de la moitié des infirmières des deux États ont connu un épuisement professionnel élevé.
  • La moitié ont donné à leurs hôpitaux des notes défavorables sur la sécurité du patient, et les deux tiers ne recommandent pas leurs hôpitaux.
  • Un tiers des patients ont jugé leur hôpital avec critique et ne le recommanderaient certainement pas à d'autres.
  • Après ajustement, chaque patient supplémentaire par infirmière augmenterait la probabilité que les infirmières et patients aggravent leur jugement (OR 1,15 à 1,52 dans les unités médico-chirurgicales ; OR 1,32 à 3,63 dans les unités de soins intensifs).
En conclusion, les infirmiers paraissent épuisés et travaillaient déjà dans des conditions de sous-effectif dans les semaines précédant la première vague de cas de Covid-19, avec à l’évidence des risques pour la santé publique.

Lasater KB, Aiken LH, Sloane DM, et al Chronic hospital nurse understaffing meets COVID-19 : an observational study BMJ Quality & Safety  Published Online First : 18 August 2020. doi : 10.1136/bmjqs-2020-011512

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Le Covid n’est définitivement pas une grippe !

On a beaucoup entendu dire - particulièrement aux Etats-Unis - que le risque associé au Covid n’était guère différent de celui d’une épidémie grippale.

Les chiffres de mortalité jusqu’en mai pouvaient laisser penser que c’était vrai avec environ 65 000 décès pour le Covid et autant pour une grippe annuelle (en fait entre 29 000 et 61 000 selon les années).

Mais ces chiffres masquent une différence considérable en termes de moyens médicaux déployés, et même masquent une réalité sur le contenu détaillé par semaine de ces chiffres et de durée de l’épidémie (beaucoup plus longue pour le Covid).

Par exemple, au cours de la semaine se terminant le 21 avril 2020, 15 455 décès ont été décomptés pour le Covid aux États-Unis.

La semaine précédente, se terminant le 14 avril, le nombre de décès a été de 14 478.

En revanche, selon le CDC, les décès comptés pendant la semaine de pointe des saisons grippales de 2013-2014 à 2019-2020 variaient de 351 (2015-2016, semaine 11 de 2016) à 1626 (2017-2018, semaine 3 de 2018).

Le nombre moyen de décès dénombrés au cours de la semaine de pointe des saisons grippales de 2013 à 2020 était de 752,4 (IC à 95 %, 558,8-946,1).

Ces statistiques sur les décès dénombrés suggèrent que le nombre de décès par Covid pour la semaine se terminant le 21 avril était de 9,5 à 44,1 fois plus élevée que la semaine de pointe des décès dus à la grippe comptée au cours des 7 dernières saisons grippales aux États-Unis, (IC à 95 %, 16,3-27,7).

Les autorités américaines  reconnaissent en plus que les rapports sur la mortalité Covid sont (très) en retard par rapport à la réalité du terrain et seront revus à la hausse pendant plusieurs mois.

Autres considérations, les décès dus au Covid peuvent être sous-estimés en raison des limitations persistantes de la capacité de tests ou des résultats de tests faux négatifs.

Lorsque les patients se présentent tardivement au cours de la maladie, les échantillons des voies respiratoires supérieures sont moins susceptibles de donner des résultats de test positifs.

Inversement, les dénombrements des décès de la grippe peuvent aussi être entachés d’erreurs car ces décès chez les adultes ne sont pas à déclarer aux autorités de santé publique, comme c'est le cas pour les décès dus au Covid.

Il est également possible que certains décès qui ont été étiquetés comme ayant été causés par le Covid ne soient pas dus au Covid.

Quel que soit le comptage et ses défauts pour chacune des pandémies, il n’y a aucun doute sur le sur-risque médical considérable associé au Covid par rapport à une grippe banale.

Faust, J. S., & Del Rio C. (2020). Assessment of deaths from COVID-19 and from seasonal influenza. JAMA Internal Medicine

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Un plaidoyer scientifique pour élargir les indications de la chirurgie bariatrique

L’obésité sévère et ses maladies associées, telles que le diabète de type 2, l'hypertension, la dyslipidémie et l'apnée du sommeil, sont très courantes aux États-Unis, mais actuellement, très peu de patients atteints de ces affections choisissent de subir une chirurgie bariatrique.

On dispose de preuves de plus en plus nombreuses sur les avantages et les risques de la chirurgie bariatrique et on est sûrement aujourd’hui arrivé à un point où les indications pourraient évoluer vers une utilisation bien plus grande de l’emploi de ces traitements.

On compte 252 000 procédures bariatriques effectuées chaque année aux États-Unis, dont environ 15 % sont des révisions (chiffres arrêtés en 2018).

Les directives des National Institutes of Health de 1991 recommandaient d'envisager la chirurgie bariatrique chez les patients ayant un indice de masse corporelle (IMC) égal ou supérieur à 40 en l’absence de comorbidité, et de 35 avec des comorbidités graves liées à l'obésité. Ces directives sont encore largement utilisées.

On dispose aujourd’hui de plus en plus de preuves que les procédures bariatriques devraient également être envisagées pour les patients atteints de diabète de type 2 et d'un indice de masse corporelle de 30 à 35 si l'hyperglycémie est insuffisamment contrôlée malgré un traitement médical optimal pour le diabète de type 2. La chirurgie entraîne une plus grande amélioration de la perte de poids et des résultats du diabète de type 2, par rapport aux interventions non chirurgicales, quel que soit le type de procédures utilisées.

Les 2 procédures les plus couramment utilisées actuellement, sleeve gastrectomy et gastric bypass ont des effets similaires sur la perte de poids et les résultats du diabète et une sécurité similaire pendant au moins 5 ans de suivi.

De nouvelles preuves suggèrent que la sleeve est associée à moins de réopérations, et le bypass peut conduire à une perte de poids et un contrôle glycémique plus durables.

Les taux de mortalité péri opératoire varient de 0,03 % à 0,2 %, des chiffres en considérable progrès par rapport au début des années 2000.

Des études randomisées à plus long terme sont nécessaires pour évaluer l'effet des procédures bariatriques sur les maladies cardiovasculaires, le cancer et autres pathologies chroniques.

Arterburn, D. E., Telem, D. A., Kushner, R. F., & Courcoulas, A. P. (2020). Benefits and Risks of Bariatric Surgery in Adults : A Review. JAMA324(9), 879-887.

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L’expérience hollandaise : effets délétères du Covid sur les patients non COVID, comment mieux y répondre ?

Une tribune hollandaise sur les retards de prise en charge de patients qui n’ont pas le Covid mais qui souffrent d’autres pathologies et ne viennent plus au cabinet.

Ces patients restent chez eux de peur de fréquenter des salles d’attentes et des patients pas toujours bien protégés avec le matériel adéquat, et du personnel médical y compris de rendez-vous qui n'est pas toujours très disponible en pleine crise.

L’Organisation Mondiale de la Santé fait état d’un effondrement des visites de ces patients, et d’un risque énorme de pathologies mal traitées.

En Espagne, les infarctus du myocarde ont ainsi chuté de 40 % pendant la pandémie… pareil en Grèce, et à peine moins dans les pays du nord de l’Europe.

Mais paradoxalement, la mortalité de ces pathologies n’a pas forcément augmenté (sur la base des résultats actuels), ce qui pourrait ouvrir des recherches sur leur prise en charge dans des conditions non Covid !

C'est aussi le cas du cancer avec un nombre de retard de diagnostic lié au Covid tout à fait impressionnant, au moins 5 000 en Hollande, plus de 30 à 40 000 en France et aux Royaume Unis ; sans parler des autres pathologies chroniques graves, dont le suivi a été abandonné ou mal réalisé pendant plusieurs mois (plus de 2,5 millions d’hollandais concernés).

Comme dit précédemment, il faudra sans doute quelques mois de plus pour faire un bilan réel et comparatif avec les années sans Covid, avec peut être de relatives bonnes surprises (révélant une sur médicalisation inutile dans les cas habituels), mais sans aucun doute aussi quelques mauvaises surprises.

Que peuvent faire les généralistes pour offrir un meilleur service ? Quelques mesures s’imposent :

  1. Dresser une liste des patients qu’il faut absolument suivre et être proactif pour les relancer.
  2. Proposer de la téléconsultation pour pallier au risque COVID, se former rapidement, mettre en place le dispositif ou rejoindre un groupe qui pratique.
  3. Séparer au cabinet les consultations à risque COVID des autres.
  4. Tester à grande échelle au moindre doute, et tracer en quarantaine par la suite les cas positifs.
  5. Se préparer différemment à une seconde vague en misant moins sur le confinement et plus sur les mesures barrières, et les groupes à risques.

Van Weert H. After the first wave: What effects did the COVID-19 measures have on regular care and how can general practitioners respond to this ? European Journal of General Practice, (2020), 26 : 1, 126-128, DOI: 10.1080/13814788.2020.1798156

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L’expérience espagnole Covid-19 : comment la médecine générale a réagi ?

L’organisation de la médecine générale varie beaucoup en Europe.

En Espagne, la médecine générale est organisée à travers de grands centres intégrés (PHC) qui couvrent une moyenne de 25 000 habitants. Tous les citoyens sont pris en charge avec un médecin et une infirmière tous deux désignés sur le principe de la capitation  (1 300 assurés par médecin-infirmier).

A Barcelone, la pandémie Covid-19 a vraiment commencé autour du 25 février 2020.

Dans les deux premières semaines, des patients symptomatiques sont venus en masse dans les centres intégrés (PHC), mais sans capacité de diagnostic vraiment éprouvé. Du coup, les professionnels sont restés peu protégés dans cette période, ce qui explique sans doute que 40 921 professionnels aient contractés la maladie au 21 mai, et 53 en soient morts.

Par la suite, les organisations se sont adaptées ; le tri des patients Covid s’est fait beaucoup plus par téléphone et en téléconsultations.

Les consultations en face à face ont été restreintes aux cas inévitables, mais avec un effet secondaire délétère de barrière psychologique installée progressivement entre citoyens et leurs généralistes.

Le nombre de patients venant physiquement au PHC s’est écroulé, au profit de la montée en puissance des téléconsultations (pour la semaine du 7 juin par exemple, 1.453.666 téléconsultations sur un total de 2.121.610 consultations pour la région de Barcelone). Pendant cette période, on note aussi 72 852 visites à domicile, et l’ouverture permanente des PHC notamment le week-end.

Une procédure s’est mise en place rapidement pour évaluer la gravité de l’évolution des cas Covid. Les patients renvoyés à la maison étaient contactés par téléphone toutes les 12, 48 ou 72 heures selon leur état clinique : 12 500 patients surveillés, 122 479 contacts de suivis.

200 maisons de retraite ont été impactées dans cette région par le COVID, avec 31 877 visites de généralistes dans ces établissements.

Six hôtels ont été réquisitionnés pour les patients à risques ou vivant avec des personnes à haut risques.

Muñoz MA., López-Grau M. Lessons learned from the approach to the COVID-19 pandemic in urban primary health care centres in Barcelona, Spain, European Journal of General Practice, (2020)  26 : 1, 106-107, DOI : 10.1080/13814788.2020.1796962

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Une nouvelle ligne d’étude prometteuse : le rôle des intuitions et des pressentiments des médecins généralistes sur le risque cancer de leur patient

De plus en plus de preuves scientifiques s’accumulent sur le rôle des intuitions des médecins généralistes dans le diagnostic du cancer et soulèvent des questions sur leur origine et leur rôle dans la pratique clinique.

Le travail proposé est une méta-analyse de la recherche internationale sur ces intuitions diagnostiques des généralistes dans les soins primaires.

La recherche porte sur six bases de données consultées de leur création à juillet 2019, et sur tout le matériel disponible sur Internet.

Une méthode séparée a été utilisée pour analyser, puis combiner, les résultats quantitatifs et qualitatifs.

Douze articles et quatre ressources en ligne ont finalement été incluses, décrivant diverses conceptualisations de ces intuitions.

Les intuitions étaient souvent initialement associées à un malaise des patients, plutôt qu'à une suspicion de cancer, et étaient fréquemment ressentis en réponse à des symptômes et à des signaux non verbaux.

Les probabilités combinées d'un diagnostic de cancer étaient quatre fois plus élevées lorsque les sentiments intestinaux étaient enregistrés (OR 4,24, intervalle de confiance à 95 % = 2,26 à 7,94) ;  ils sont devenus plus prédictifs du cancer à mesure que l'expérience clinique et la familiarité avec le patient augmentaient.

Bien qu'ils soient inclus dans certaines lignes directrices cliniques, les médecins généralistes ont eu des expériences variées sur la verbalisation de ces  intuitions, certains spécialistes remettant en question leur valeur diagnostique.

Du coup, beaucoup de médecins généralistes hésitent à donner une suite à ces intuitions, à en parler, à l’inscrire dans le dossier médical, à lancer des explorations, et plus encore à adresser à des confrères spécialistes, et le résultat est plutôt au détriment du patient compte tenu de la valeur réelle statistique de ces intuitions.

Sans parler que cette construction des intuitions, acquise et améliorée avec l’accumulation de l’expérience, échappe totalement à la formation, alors qu’elle pourrait être mieux entraînée chez les jeunes généralistes.

Smith, C. F., Drew, S., Ziebland, S., & Nicholson, B. D. (2020). Understanding the role of GPs’ gut feelings in diagnosing cancer in primary care : a systematic review and meta-analysis of existing evidence. British Journal of General Practice70(698), e612-e621.

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Le suivi et dépistage des cancers en France par la médecine générale

Cet article, réalisé par une équipe française, traite du suivi et du dépistage des cancers par la médecine générale.

Il s’agit d’une étude rétrospective sur les bases de cancérologies nationales. Les données sont ajustées sur l’âge et le sexe.

Voici les résultats sur 20 613 consultations enregistrées : 

  • 580 concernaient un dépistage du cancer (2,8 %),
  • 475 le suivi des cancers (2,3 %).

Les procédures les plus fréquentes de dépistage concernent :

  • le cancer colorectal (38,6 %),
  • le cancer du sein (32,6 %),
  • le cancer du col de l'utérus (17,0 %),
  • et le cancer de la prostate (9,3 %).

En consultation, les types de cancer les plus fréquemment suivis sont : 

  • Le cancer du sein (44,9 %) et colorectal (10,5 %) chez les femmes.
  • Les cancers de la prostate (37,3 %) et de la peau (10,3 %) chez les hommes. 

Après ajustement sur l'âge et le sexe, les consultations avec suivi du cancer comportaient en moyenne 1,9 questions de santé en plus de la question spécifique du cancer.

Les consultations en lien avec le cancer en médecine générale impliquent moins souvent un patient à faible revenu que les autres consultations (2,4 % vs 4,2 % pour le dépistage et 1,1 % vs 4,2 % pour le suivi).

Au total, environ 5 % des consultations de médecine générale en France incluent un dépistage ou un suivi du cancer.

Les inégalités socio-économiques restent un facteur significatif - mais mal expliqué - de limitation d’accès aux consultations de médecine générale sur ce thème.

Lamort-Bouché M. , Chardon  M., Kellou N., Ray- Coquard I., Colin C., Letrilliart L. (2020) Cancer screening and follow-up in general practice : A French nationwide cross-sectional study, European Journal of General Practice, 26 : 1, 95-101, DOI : 10.1080/13814788.2020.1784875

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Enquête internationale comparée dans 11 pays occidentaux sur les facteurs de stress au travail en médecine générale

Le stress au travail et le burnout chez les médecins généralistes sont des problèmes de plus en plus préoccupants.

Le travail propose une étude transversale internationale entre 11 pays occidentaux menée dans le cadre du Commonwealth Fund International Health Policy Survey of Primary Care Physicians.

Les pays participants sont l' Australie, le Canada, la France, l'Allemagne, les Pays bas, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, la Suède, la Suisse, le Royaume Uni et les Etats-Unis.

Les médecins généralistes en exercice ont été tirés au sort sur la base des listes gouvernementales ou privées de chaque pays (N = 12 049).

Le stress au travail a été mesuré par la question :

"Dans quelle mesure votre travail en tant que médecin généraliste est-il stressant ?" (Échelle de Likert en 5 points).

De nombreuses caractéristiques d'organisation et de fonctionnement des pratiques ont fait l’objet de questions complémentaires :

  1. La prévalence du stress au travail varie de 18 % à 59 % selon les pays.
  2. Le stress au travail est plus élevé chez les généralistes âgés de 45 à 54 ans (âge moyen) ( [OR] 1,35, intervalle de confiance à 95 % [IC] = 1,07 à 1,70) et ceux exerçant en zone urbaine (OR 1,23, IC à 95 % = 1,15 à 1,31).
  3. Elle est également associée à une charge de travail hebdomadaire élevée supérieure à 50 heures/semaine (OR 2,88, IC à 95 % = 2,38 à 3,50).
  4. Une pression administrative qui dépasse 10 % du temps de travail (OR 1,65, IC à 95 % = 1,44 à 1,89).
  5. De longs délais pour obtenir des informations à leur sortie des patients de l’hôpital.
  6. Une difficulté à offrir des rendez-vous le jour même (OR 1,74, IC à 95 % = 1,18 à 2,56).
  7. Le fait d’être suivi dans l’institution de travail par des objectifs de rendement et des indicateurs (OR 1,15, IC à 95 % = 1,05 à 1,24).

Inversement, les longues consultations (OR 0,64, IC à 95 % = 0,53 à 0,76) et le travail dans un cabinet de groupe où exerce un "case manager", un collègue disponible pour orienter et discuter des patients difficiles, étaient associés à un moindre stress au travail.

La grande majorité des résultats sont comparables dans tous les pays.

Les résultats français sont globalement dans la moyenne des 10 autres pays sauf en ce qui concerne une sensibilité importante au stress des jeunes médecins français VS un maximum chez les médecins plus âgés des autres pays), et sur la durée de consultation (moins sensible que dans les autres pays).

En conclusion, les lourdes charges de travail et la pression temporelle sont clairement associées au stress au travail des généralistes. Mais on voit aussi comment l’influence positive des changements organisationnels tels que l'emploi de "case manager" dans le cabinet de groupe, et l'autorisation de consultations plus longues pourraient réduire ce fardeau.


Cohidon, C., Wild, P., & Senn, N. (2020). Job stress among GPs : associations with practice organisation in 11 high-income countries. British Journal of General Practice70(698), e657-e667.

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Les aides électroniques à la prescription médicamenteuse peuvent s’avérer piégées et inutilement coûteuses pour la prescription des génériques, volontairement ou involontairement

Les dossiers de santé électroniques sont un standard obligé, ils contiennent : 

  • l’histoire médicale du patient,
  • les informations médicales,
  • les résultats complémentaires.

Ils sont aussi dotés d’aides électroniques notamment pour les prescriptions médicamenteuses.

En Angleterre, comme dans beaucoup de pays, la France compris, il est conseillé aux professionnels de la santé de "prescrire de manière générique" pour maîtriser les dépenses de santé.

Cette prescription de générique se fait souvent en utilisant un paramétrage du logiciel par défaut et une confiance de fait du généraliste sur le bien-fondé du choix du logiciel.

Or, il s’avère que ces systèmes d’aide semblent favoriser ce que l’on appelle des "génériques de marques fantômes" (en anglais "Ghost-branded generics") correspondant à des prescriptions spécifiant (imposant, demandant) un fabricant particulier pour un produit générique, ce qui entraîne paradoxalement souvent un prix de remboursement plus élevé par rapport au marché générique disponible.

Cette nouvelle pratique de prescription, souvent appuyée par les systèmes d’aides électroniques et une offre agressive commerciale des laboratoires, contourne de fait l’intérêt économique du générique le moins cher et renvoie à une prescription orientée que les génériques voulaient supprimer.

Une étude de cohorte rétrospective a été conduite entre mai 2013 à mai 2019 sur la base de données anglaise des prescriptions OpenPrescribing.net extraite des dossiers médicaux informatiques.

Les dépenses totales de prescription en médecine générale en Angleterre des génériques de marque fantôme ont été calculées, et les dépenses excédentaires sur les génériques de marque fantôme ramenées en pourcentage de toutes les dépenses en médicaments génériques, pour chaque grande catégorie de pathologie, pour chaque mois de la période d'étude.

Le résultat de cette étude : 31,8 millions de génériques de marque fantôme prescrits en 2018, avec un estimé de surcoût de 9,5 millions de livres sterling. Pour mémoire, on était à 7,45 millions de génériques de marque fantôme prescrits avec un surcoût de 1,3 million de livres sterling en 2014.

La plupart des coûts excédentaires ont été associés à un logiciel d’aide à la prescription, le logiciel "SystmOne". "SystmOne" proposait par défaut des options génériques de marque fantôme.

Après avoir informé les gestionnaires de ce système sur les biais induits, les auteurs ont surveillé l'évolution ultérieure des coûts et ont constaté une diminution rapide des dépenses génériques de marque fantôme.

En conclusion, l’étude montre qu’un logiciel d’aide mal paramétré, volontairement ou involontairement, a pu conduire à 9,5 millions £ de surcoûts de prescriptions évitables pour le NHS en 1 an.

La notification du fournisseur a entraîné une modification de l'interface utilisateur et une réduction rapide et substantielle des dépenses.

Cette constatation montre que la conception de l'interface utilisateur de ces logiciels d’aide a un impact considérable sur la qualité, la sécurité et le ratio coût/efficacité de la pratique clinique ; cela devrait être une priorité pour la recherche quantitative.

MacKenna, B., Curtis, H. J., Walker, A. J., Bacon, S., Croker, R., & Goldacre, B. (2020). Suboptimal prescribing behaviour associated with clinical software design features : a retrospective cohort study in English NHS primary care. British Journal of General Practice70(698), e636-e643

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La longue bataille sur la réduction de l’écart inacceptable de rémunération au Canada entre médecins féminins et masculins

Les femmes médecins canadiennes gagnent systématiquement moins que leurs collègues hommes.

L'écart de rémunération entre les femmes et les hommes existe au sein de chaque spécialité médicale ainsi qu'entre les spécialités, les médecins des spécialités dites "masculines"- chirurgie par exemple - bénéficiant d’écarts de rémunérations encore plus élevées.

L'écart de rémunération entre les hommes et les femmes en médecine ne s'explique pas par le fait que les femmes travaillent moins d'heures ou moins efficacement, mais est plutôt lié à un biais systémique dans les facultés de médecine, à l'embauche, lors des promotions dans la carrière, et par le barème des honoraires et facturation des soins au patient (les hommes facturant souvent plus que les femmes pour le même acte).

Les actions destinées à combler ces écarts portent sur la remise en question du programme de la formation médicale, en se battant pour une égalité réelle inter-sexe y compris dans les spécialités, des processus d'embauche et de traitement des candidatures et postes tout au long de la carrière, qui soient plus transparents et attentifs au même traitement pour les deux sexes, la modification de la valeur relative des honoraires et la déclaration transparente des paiements des médecins stratifiés par sexe.

Cohen, M., & Kiran, T. (2020). Closing the gender pay gap in Canadian medicine. CMAJ192(35), E1011-E1017.

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