Pose d'une prothèse totale de hanche : les conséquences dramatiques d'un suivi post-opératoire inadapté...
Assignation du chirurgien orthopédiste, du chirurgien orthopédiste remplaçant, de l’anesthésiste-réanimateur et du cardiologue par le patient, en mars 2007, en réparation du préjudice qu’il avait subi
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Les experts, professeurs des universités, l’un chirurgien orthopédiste, l’autre chirurgien vasculaire, estimaient que le patient avait été victime, dans les suites de la mise en place d’une prothèse totale de hanche gauche, d’une obstruction de la branche gauche de la prothèse aorto-bifémorale dont il était porteur depuis 5 ans. Cette obstruction avait nécessité, après échec d’une désobstruction, la réalisation d’un pontage sus-pubien permettant à partir de la branche prothétique droite, la revascularisation du membre inférieur gauche. Cette complication vasculaire avait laissé persister des complications neurologiques déficitaires à type de paralysie dans le territoire du sciatique poplité externe avec douleur neurogène plantaire retentissant sur la fonction du membre inférieur gauche. Pour les experts, « (…) Ces séquelles n’étaient pas dues à la survenue de l’obstruction prothétique fémorale elle-même, mais à la durée de l’ischémie du membre inférieur gauche et, en particulier au défaut de vascularisation notamment musculaire et des troncs nerveux périphériques, fonction du délai écoulé avant la revascularisation obtenue, après rétablissement de la circulation fémorale gauche (…) ». IIs excluaient toute responsabilité de la mise en place de la prothèse totale de hanche dont le résultat clinique était bon et qui ne faisait l’objet d’aucune plainte de la part du patient. Ils rappelaient que toutes les précautions préopératoires requises en fonction des antécédents vasculaires du patient avaient été prises par le chirurgien orthopédiste et le chirurgien vasculaire. Par ailleurs, le patient avait été informé du risque éventuel de complication vasculaire. En revanche, il existait un retard évident au diagnostic et au traitement de l’obstruction vasculaire : « (…) Le début de traduction clinique, indiscutablement évocatrice des troubles vasculaires, peut être fixé à la matinée du 31/10 (9 h)…Le diagnostic a été méconnu, faute d’être évoqué jusqu’au retour et à l’examen du chirurgien orthopédique le 01/11 à 19 h 30... L’attitude diagnostique et la prise en charge thérapeutique adaptées ont été faites par le chirurgien vasculaire dès son premier appel le 2/11 à 10 h (…)
Les experts reprochaient au chirurgien remplaçant d’avoir commis une erreur diagnostique et surtout de ne pas s’être donné les moyens de faire le bon diagnostic, en soulignant l’importance des douze premières heures dans la récupération clinique des lésions ischémiques nerveuses : « (…) La sémiologie d’ischémie aiguë le 31/10 vers 12 h ne laissait aucun doute quant au diagnostic. Un examen clinique simple que tout médecin non spécialisé doit savoir faire (palpation des pouls fémoraux) aurait mis en évidence l’obstruction de la branche gauche de la prothèse. Avant de rejeter ce diagnostic, il aurait dû en faire état à ses collègues anesthésistes et surtout au Dr Z … qui était de garde le 31/10 et le 01/11 (…) »
Concernant l’anesthésiste, ils s’étonnaient que : « (…) Ses seules prescriptions aient été en rapport avec l’état d’agitation de l’opéré … sans que le diagnostic d’ischémie aiguë ait pu être envisagé !!! (…) »
Au cardiologue, ils reprochaient : « le caractère lacunaire de son examen », estimant qu’ « (…) Un tel spécialiste ne pouvait pas méconnaître le diagnostic d’ischémie aiguë, si l’examen du membre avait été pratiqué (…) »
Quant au chirurgien orthopédiste, si les experts reconnaissaient qu’il avait évoqué le diagnostic d’ischémie aiguë, il n’en avait pas reconnu la gravité, ni l’urgence du traitement, « (…) L’examen Doppler dont il fait état n’a été qu’une caricature en n’examinant pas l’artère fémorale, examen de base d’un Doppler artériel des membres inférieurs (…) ». Ce faisant, il avait retardé de plus de 12 heures la prise en charge effective de cette ischémie par le Dr Z…
IPP estimée à 16 %
Tribunal de Grande Instance (février 2012)
Pour les magistrats, « (…) Force était de constater que les 4 médecins mis en cause, avaient chacun commis une faute à l’égard d’un patient âgé et fragile, en n’établissant pas ou tardivement le diagnostic d’ischémie aiguë… Néanmoins, le plus impliqué était le Dr X…, chirurgien remplaçant qui dès le départ assurait le suivi du patient pendant l’absence du chirurgien orthopédique et n’ a pas été en mesure d’établir immédiatement le diagnostic, de sorte que sa part de responsabilité sera fixée à 50 % …Le médecin anesthésiste qui achevait sa garde et n’a examiné qu’une seule fois le patient pour une pathologie sans rapport direct avec la complication ischémique, a une responsabilité moindre, pouvant être fixée à 10 %... Quant à la part du chirurgien orthopédique et du cardiologue, il n’y a pas lieu de la fixer dès lors que ceux-ci ne le demandent pas et que la compagnie d’assurances représentée aux débats n’est pas recevable à le faire pour eux (…) »
Indemnisation de 49 441 € dont 10 441 € pour la CPAM en remboursement des dépenses de santé induit par la mauvaise prise en charge.