Absence de surveillance après adénomectomie prostatique

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Absence de surveillance après adénomectomie prostatique : retard diagnostique de cancer de la prostate

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  • Absence de surveillance après adénomectomie prostatique : retard diagnostic de cancer de la prostate

Un défaut de suivi postopératoire du taux de PSA chez un patient opéré d'une adénomectomie prostatique entraîne une suite de complications menant au décès du patient d'un cancer de la prostate...

  • Médecin
  • Chirurgien
Auteur : Dr Christian SICOT / MAJ : 27/03/2019

Cas clinique

  • Fin août 2009, un homme de 70 ans, enseignant retraité consulte son médecin traitant pour des difficultés mictionnelles, à type de dysurie et de brûlures mictionnelles. Le 2 septembre 2009, l'échographie conclue à "Hypertrophie prostatique marquée avec vraisemblablement rétention vésicale et hydronéphrose d'amont". Le bilan biologique montre un taux de PSA à 74,39 ng/ml (N< 5) et une insuffisance rénale (chiffre non communiqué dans le dossier).
  • Le 3 septembre 2009, le patient est adressé par son médecin traitant aux urgences du centre hospitalier régional pour rétention vésicale complète.
  • Du 3 au 15 septembre 2009, hospitalisation dans le service d'urologie : "(...) Rétention urinaire aiguë. Orchi-épididymite aiguë droite. Grosse prostate. Syndrome inflammatoire. Insuffisance rénale. Echec d'une tentative de sevrage de la sonde urinaire. Réhospitalisation dans 15 jours pour adénomectomie prostatique par voie haute. Traitement de sortie : Oflocet 200x2/j (...)".
  • Du 23 septembre au 7 octobre 2009, hospitalisation pour adénomectomie prostatique.
  • Le dossier d'hospitalisation ne contient que le compte-rendu provisoire suivant : "(...) Le 28 septembre 2017, adénomectomie par voie haute. Suites simples. Mictions spontanées satisfaisantes. RV consultation Uro dans 2 mois pour débitmétrie Contrôles postransfusionnels dans 3 mois (...)".
  • Pas de compte-rendu opératoire disponible. Absence de lettre de sortie. Pas de traces de la consultation urologique postopératoire prévue.
  • Le compte-rendu anatomo-pathologique conclue : "Hyperplasie fibro-adénomateuse prostatique ; Absence de signes de malignité".
  • Après sa sortie de l'hôpital, le patient n'est suivi que par son médecin traitant.
  • En octobre 2012, soit 3 ans plus tard, récidive des difficultés urinaires (pollakiurie nocturne à 4 mictions, dysurie) mais sans brûlures mictionnelles, ni hématurie.
  • Le médecin traitant demande une échographie vésico-prostatique et rénale qui met en évidence: "Une hypertrophie discrètement asymétrique et hétérogène du lobe médian prostatique avec un résidu postmictionnel estimé à 220 ml, sans anomalie, ni dilatation des cavités rénales".
  • Le 20 novembre 2012, consultation d'urologie au centre hospitalier régional. L'interne de spécialité répond au médecin traitant : "(...) Le TR met en évidence une hypertrophie prostatique en bout de doigt, avec perception de deux nodules. Cette prostate me paraît suspecte. Malheureusement le patient n'a pas réalisé de dosage du PSA. En pratique je demande un nouveau dosage de PSA et le reverrai prochainement pour réaliser une fibroscopie associée à une biopsie prostatique (...)".
  • 20 décembre 2012, dosage du PSA à 245 ng/ml.
  • 8 janvier 2013, Fibroscopie et biopsie prostatique "(...) Fibroscopie sans particularité au niveau de la paroi vésicale. En revanche, on retrouve un remaniement d'allure suspecte au niveau du col vésical. Biopsie prostatique. Au niveau des 12 fragments biopsiques étudiés, aspect histologique d'infiltration massive par un adénocarcinome prostatique, peu différencié score 9 (5+4) selon Gleason. Présence d'engainements tumoraux périnerveux. Absence d'extension néoplasique extracapsulaire décelable au niveau de ces prélèvements (...)".
  • 30 janvier 2013, scintigraphie osseuse : "dissémination ostéo-médullaire métastatique axiale diffuse".
  • 19 février 2013, scanner abdomino-pelvien : "ostéose condensante diffuse affectant le rachis lombo-sacré et les os iliaques".
  • 21 février 2013, IRM prostatique: "prostate asymétrique, épaissie du côté gauche où elle forme un ensemble avec la vésicule séminale et la paroi vésicale, envahies. En arrière, toujours du côté gauche, du tissu franchit la capsule pour s'étendre dans la graisse péri-rectale jusqu'à avoir une large surface de contact avec le rectum".
  • 4 mars 2013, Réunion de Concertation Pluridisciplinaire (RCP) qui propose une hormonothérapie première. Un chirurgien urologue prescrit un traitement par Casodex (anti androgène), 3 comprimés/j et Enantone (analogue de la LH.RH) 1 injection/ tous les 6 mois.
  • 11 juin 2013, consultation auprès du chirurgien urologue, PSA à 6,59. Poursuite du traitement hormonal.
  • Août 2013, douleurs lombaires d'intensité croissante nécessitant l'instauration d'un traitement antalgique de palier 2.
  • Novembre 2013, dégradation de l'état général Traitements morphinique et corticoïde prescrits.
  • Décembre 2013, en scintigraphie osseuse, infiltration métastatique diffuse touchant l'ensemble du rachis, les côtes et les os du bassin.
  • Arrêt du Casodex. Mise en place d'un traitement de 2ème ligne par Abiratérone et Xgeva associé à une radiothérapie antalgique.
  • 10 janvier au 6 février 2014, hospitalisation dans le service d'oncologie du CHR pour altération de l’état général puis dans le service de Soins de Suite et de Réadaptation. Retour à domicile le 7 avril 2014.
  • Hospitalisation du 12 au 19 septembre 2014 dans le service d'oncologie pour échappement thérapeutique et altération majeure de l'état général. Un traitement de 3ème ligne n'étant pas possible, le patient était transféré en soins palliatifs.
  • Décès le 27 novembre 2014.

Saisine de la CCI par le fils du patient (mai 2017) pour obtenir réparation du préjudice subi.

Analyse et expertise

Analyse

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  1. Lisez en détail le cas clinique.
  2. Oubliez quelques instants cette observation et rapportez-vous au tableau des barrières, identifiez les barrières de Qualité et sécurité que vous croyez importantes pour gérer, au plus prudent, ce type de situation clinique. Le nombre de barrières n’est pas limité.
  3. Interrogez le cas clinique avec les barrières que vous avez identifiées en 2 ; ont-elles tenu ?
  4. Analysez les causes détaillées avec la méthode des Tempos

Expertise (octobre 2017)

  • Pour les deux experts, professeurs des universités, chirurgiens urologues : "(...) L'indication de l'adénomectomie prostatique en septembre 2009 était justifiée du fait de la rétention urinaire avec insuffisance rénale débutante et infection urinaire. La rétention vésicale et l'orchite associée étaient 2 éléments entraînant une forte élévation du taux de PSA. Celui-ci, en l'absence de cancer associé, devait revenir à la normale dans les 3 mois après traitement de ces 2 affections. Il eut été nécessaire de faire un contrôle du taux de PSA lors de la consultation postopératoire et, si celui-ci avait commencé à diminuer, un autre au bout de 3 mois. La persistance d’un taux anormal aurait alors nécessité la réalisation de biopsies de la prostate dans un délai de 6 mois, au maximum, après l'intervention.
  • Le suivi urologique d'un patient porteur d'une pathologie prostatique relève, du chirurgien urologue qui a pris en charge la maladie. Le médecin traitant ne pouvait assurer ce suivi, d'autant qu'il ne disposait ni du compte-rendu opératoire, ni de la lettre de sortie du patient.
  • Dans ce même domaine, la prise en charge du Centre hospitalier régional n'avait pas été faite dans les règles de l'art. Il n'était indiqué nulle part dans le dossier médical relatif à l'intervention de 2009, de référence à ce taux élevé de PSA. Même si le service d'urologie n'avait pas eu connaissance de ce taux élevé réalisé dans un laboratoire privé, il était anormal que, dans le bilan de l'intervention de 2009, un dosage de PSA n'ait pas été demandé par le service d'urologie. C'est une préconisation absolue lorsqu'on prend en charge, un homme de l'âge du patient pour une pathologie prostatique. Par ailleurs, l'absence de suivi du patient après son adénomectomie, l'absence de compte-rendu opératoire et de lettre de sortie, l'absence de rendez-vous de consultation pour le suivi postopératoire relevaient d'un dysfonctionnement dans l'organisation du Centre hospitalier régional.
  • De façon certaine, la prise en charge du patient n'avait pas été conforme aux préconisations et avait entraîné une découverte de son cancer prostatique avec 3 ans de retard, ce qui constituait, donc, une perte de chance.
  • Sachant qu'un cancer de la prostate même métastatique peut aboutir à une survie prolongée en fonction de son agressivité initiale, la méconnaissance complète de ce critère chez le patient rendait difficile l'appréciation exacte de la perte de chance.
  • Des biopsies faites en janvier 2010, soit 3 mois après l'adénomectomie, auraient-elles découvert un cancer et à quel stade ? Il est impossible rétrospectivement de répondre avec certitude. L'examen au microscope de l'ablation de la prostate en 2009 n'avait pas trouvé de cellules cancéreuses, ce qui ne veut pas dire que le cancer n'existait pas déjà à ce moment-là. Le cancer de la prostate se développe principalement, au début, sur la coque prostatique qui est préservée lors d'une adénomectomie prostatique. Il est impossible de savoir si, en 2009, il n'y avait pas déjà des cellules suspectes sur la coque prostatique. S'il y avait eu un cancer, celui-ci n'aurait probablement pas été métastatique. Et le traitement complémentaire (radiothérapie, hormonothérapie, chimiothérapie) aurait permis une survie probablement plus importante.
  • Le non-diagnostic du cancer de la prostate plus précocement est à l'origine d'une perte de chance que l'on peut estimer à 50 % (...)"

Commission de Conciliation et d'Indemnisation (décembre 2017)

La CCI estimait que: "(...) D'après l'évolution vraisemblable de la pathologie prostatique du patient au décours de l'intervention de septembre 2009, tel que l'exposaient les experts, le médecin traitant se devait d'en assurer le suivi. Associée à ce manquement, l'absence de surveillance urologique au décours de l’intervention réalisée au Centre hospitalier régional était à l'origine d'un retard de prise en charge de 3 ans, constitutif d'une perte de chance de 50 % d'éviter le décès précoce du patient. Ce retard était imputable pour un tiers au médecin traitant et pour deux tiers au Centre hospitalier régional (...)".

1 Commentaire
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