Revue de presse - Avril 2022

Tout sur la gestion des risques en santé
                et la sécurité du patient

Revue de presse - Avril 2022

  • Réduire le texte de la page
  • Agrandir le texte de la page
  • Facebook
  • Twitter
  • Messages0
  • Imprimer la page

Retrouvez l'analyse de la presse internationale sur le risque médical, réalisée par le Professeur Amalberti.

Auteur : Pr René AMALBERTI, Docteur en psychologie des processus cognitifs, ancien conseiller HAS / MAJ : 04/04/2022

Arrangements divers et contournements dans l’usage des dossiers médicaux informatiques : quels risques, quels bénéfices ?

L’arrivée dans les cabinets des dossiers médicaux informatisés ne va pas sans difficultés et d’appréhensions des utilisateurs (docteurs et professionnels de santé plus généralement). Ces outils sont évidemment très utiles, mais sur le moment plutôt consommateurs de temps, souvent exigeants et rigides ; ils demandent de l’apprentissage guidé (rarement réalisé) et sont non exempts de pannes et bugs divers comme tout logiciel informatique.

Du coup, beaucoup d’utilisateurs contournent partiellement le système, ne remplissent qu’une partie des champs, doublent avec des documents papiers, etc. C’est ce que l’on appelle en anglais des workarounds, des contournements en français. Ces mésusages souvent déclenchés au départ par des dysfonctionnements ponctuels, finissent par devenir des habitudes.

Cette étude hollandaise liste les mésusages des dossiers électroniques/contournements observés dans six cabinets médicaux à travers des observations et des entretiens avec 17 professionnels, médecins, infirmiers et administratifs.

Onze types de contournements sont identifiés, essentiellement par le fait des médecins. Ils se regroupent en trois grandes catégories :

Contourner la logique du logiciel

  • Ignorer les alertes et pop-up pendant qu’on remplit le dossier, par exemple sur les allergies où sur comment ne pas oublier tel point ou tel autre (…il y en a sans arrêt, on perd trop de temps, on discute avec le patient, on veut accéder à quelque chose et on est barré par des alertes qui remontent et s’imposent en cassant la conversation…).
  • Commencer à remplir en avance sans le patient.

Agir sur l'entrée des données

  • Faire du couper-coller de morceaux de dossiers quand on reprend un point à distance temporelle plutôt que d’accéder aux données enregistrées.
  • Prendre des notes dans des champs libres plutôt que de remplir le dossier électronique tel que c’est prévu.
  • Laisser des champs non remplis.
  • Donner des accès à des professionnels du cabinet non autorisés.
  • Entrer des données incorrectes pour contourner ce que l’on perçoit comme une mauvaise barrière, notamment sur les prescriptions.

Se passer du système 

  • Tout entrer en double papier-informatique.
  • Utiliser un autre système personnel informatique en parallèle.
  • Prescrire en dehors du logiciel.
  • Ne pas utiliser le  système dans sa fonction d’outil de contrôle de délivrance de médicaments (pour les infirmières à l’hôpital).

Ces différents contournements apparaissent tous très utiles pour les utilisateurs, mais leur analyse montre qu’ils sont aussi porteurs de menaces pour la sécurité du patient et pour l’organisation globale de la prise en charge du patient, notamment l’utilisation partagée du dossier médical.

Boonstra, A., Jonker, T. L., van Offenbeek, M. A., & Vos, J. F. (2021). Persisting workarounds in Electronic Health Record System use : types, risks and benefits. BMC medical informatics and decision making, 21(1), 1-14.

Lire l'article

Le déficit et rationnement de soins infirmiers : défis et solutions

L’Europe vient de subventionner, en 2018-2020, une coordination de laboratoires de recherche (Allemand, Belge, Chypriote, Finlandais, Grec, irlandais, Lituanien, Maltais, Polonais, Portugais, Suisse, Tchèque)  sur le thème du déficit et rationnement de soins infirmiers pour diverses causes, dont la plus évidente est le manque d’effectifs. Cette action relève d’une action COST (European Cooperation in Science and Technology), et a pris le nom de RANCARE (RAtioning-missed Nursing CARE : an international and multidimensional problem)

Un livre vient d’être publié résumant tous les apports de ce projet sur ce sujet brulant, largement en lien avec le manque croissant d’effectifs infirmiers.

Ce livre comporte quatre parties essentielles reflétant les objectifs du projet :

  • Une revue de littérature complète sur le sujet, et particulièrement l’histoire du concept de rationnement des soins, et du concept d’erreurs qui lui est souvent associé, parfois de façon excessive. Les types de soins concernés sont très variés, allant de soins psychologiques (manque de disponibilité et de temps d’écoute auprès du patient), jusqu’à des soins plus techniques effectués trop rapidement ou pas du tout (toilettes, soins de corps divers, voire procédures complètes sautées ou simplifiées). On y lit que les premiers travaux en 2001 sont apparus avec l’analyse des soins inachevés (tasks left undone) puis ont progressivement glissé vers le concept de soins manquants, non réalisés, ou rationnés. (missed nursing care, impliclt rationed nursing care). Le concept est souvent difficile à étudier puisqu’il porte par définition sur une absence. Cette absence peut toutefois être indirectement mesurée par ses effets sur la Qualité ou la Sécurité des soins, sur le moral des professionnels, ou sur d’autres dimensions, mais ce ne sont que des approches indirectes.
  • Une analyse des interventions correctives qui réduisent le préjudice pour les professionnels et pour les patients, y compris l’utilisation de nouvelles technologies.
  • Une discussion sur les questions éthiques et légales induites par le manque de soins, ou son rationnement.
  • Une perspective sur les questions de formation des infirmiers à ces situations de rationnement de soins, quelles priorités, quelles logiques respecter.

Un livre à lire, écrit de plusieurs mains avec forcément de grandes disparités d’approches, mais sur un sujet devenu majeur, où il fait clairement objet de précurseur scientifique et, où le contenu est souvent de grande qualité.

Papastavrou, E., & Suhonen, R. (Eds.). (2021). Impacts of Rationing and Missed Nursing Care : Challenges and Solutions : RANCARE Action. Springer Nature.

Lire l'article

Partager ses notes médicales : aspects légaux, risques et bénéfices

Les Etats-Unis ont voté une loi fédérale en avril 2021 pour demander aux professionnels de santé et aux organisations de santé d’ouvrir l’accès aux dossiers médicaux informatisés aux patients, sans coût ni restriction pour eux, en tout cas en ce qui concerne les notes prises en consultation, les documents de sorties (des hôpitaux, des institutions), les notes sur l’anamnèse et l’histoire médicale du patient, et l’ensemble des résultats complémentaires (imagerie, laboratoire, etc).

Cette loi représente un changement culturel profond pour les professionnels comme pour les patients.

Cet article en interroge les bénéfices et inconvénients. Beaucoup de médecins anticipent notamment que cet accès va se retourner contre eux et provoquer ou nourrir plus de plaintes.

Quels bénéfices à partager ces informations ?

L’accès donné aux patients engage mieux ces patients et peut réduire les délais de diagnostic, réduire les erreurs, améliorer les relations patient-médecin. Les patients peuvent être utilisés comme des détecteurs actifs de retards dans le retour d’examens ou dans la réponse donnée par le médecin, d’alertes pour eux, de rappel pour faire des actions attendues, etc.

Dans un questionnaire adressé à 6 913 patients adultes sortants d’un hôpital général et 2 672 parents d’enfants sortant d’un hôpital pédiatrique, 53,8 % des patients et 58,4 % des parents reconnaissaient que lire le dossier leur a permis de mieux se rappeler des rendez-vous à suivre, des tests à faire, etc.

Les identifier dans leur dossier servent aussi la sécurité des soins des patients.

Ainsi, dans un questionnaire adressé à 29 636 patients (avec 22 % de taux de réponse) dont au moins 18 301 avaient lu au moins une note rédigée les concernant, 1 patient sur 5 a relevé une erreur, et 42,3 % ont considéré que cette erreur était importante. Le plus souvent, il s’agit d’erreurs sur les diagnostics, l’anamnèse, les médicaments prescrits, les notes concernant d’autres patients mélangés à leur dossier, ou des erreurs de côté de leur pathologie. Rappelons ici que la loi américaine ne prévoit aucune faute à l’encontre du médecin pour une erreur d’écriture si elle ne s’accompagne pas de conséquences négatives avec atteinte réelle du patient. De ce fait, prévenir le médecin ou rapporter une erreur dans un dossier médical éviterait plutôt des conséquences qui pourraient tomber sous le coup de la loi.

Une analyse récente de 20 études randomisées comparant l'accès possible par rapport à l'accès impossible au dossier montre que partager le dossier médical est bien une source d’amélioration de la sécurité du patient et non une augmentation de l’exposition légale du médecin.

Et même quand il y a erreur matérialisée par ses conséquences, le fait de partager les notes peut plutôt jouer dans le sens d’une réduction de l’exposition juridique. L’ouverture de ses propres notes est plutôt associée positivement à un signe d’humilité, de volonté de partager, d’ouverture d’esprit qui jouent en faveur du médecin.

Enfin, le partage de notes peut rendre plus transparent les cas où il y a une réelle gravité dans les erreurs constatées et réduire (aux Etats-Unis au moins) le flux élevé de dépôts de plaintes par des avocats qui verraient mieux ce qui n’a aucune chance d’aboutir.

Quels risques ?

Il reste aussi des éléments à risques dans le partage de notes dans plusieurs cas :

  • si les données accessibles provoquent, par elles-mêmes et la façon dont elles sont formulées, un traumatisme psychologique au patient ;
  • s’il apparait que les médecins essaient de masquer, changer le contenu pour se protéger ;
  • s’il apparait que les médecins ne corrigent pas les erreurs signalées, etc.

On a pu observer par exemple dans une étude récente de type "avant-après" sur l’ouverture des notes au patients, réalisée par questionnaire adressé à 192 médecins (65 % de réponse), que 52 % des médecins avouaient être maintenant moins candides dans la façon de rédiger le dossier, modifiant la façon de parler des problèmes mentaux ou les orientations sexuelles relevés chez leurs patients, et aussi la façon dont ils qualifient certaines affections comme l’obésité. 

Ces attentions particulières à écrire le contenu sont aussi une source potentielle de stress surajouté pour le médecin, avec une contribution potentielle au risque général de burnout. Sans parler du fait que l’ouverture des notes peut amener plus de questions, plus de messages des patients auxquels il faut répondre, bref plus de charge de travail et de temps à passer sur les dossiers.

On notera cependant que la nouvelle réglementation américaine autorise la consultation des notes cliniques du dossier médical sous conditions. Le médecin peut ainsi refuser l’accès au motif que lire l’information médicale puisse être une source par elle-même de traumatisme psychologique et augmenterait par exemple le risque suicidaire (sur des patients psychiatriques notamment). En même temps, on sait aussi que les patients qui font moins confiance à leur médecin sont ceux qui les poursuivent le plus souvent. La relation établie par l’accès au notes médicales ne doit donc pas réduire cette confiance par des actions volontaires de masquage ou de blocage.

Un autre point critique renvoie aux patients qui demandent à modifier des notes médicales sans contexte d’erreur de la part du médecin, voire en déniant des faits réels. Si le médecin n’obtempère pas, et que ce sujet revient par association, ou dans un contexte différent, un sujet d’évènement indésirable dans la suite de la relation, l’acte de refus pourrait desservir la défense du médecin. Toutefois, les jurisprudences américaines sont encore incertaines sur ce sujet.

Globalement, la balance penche quand même plutôt à ouvrir ces notes au patient, mais on voit qu’il faudra penser à la formation des médecins, et plus généralement des patients aussi via des associations de patients qui doivent jouer un rôle positif dans ce domaine, sans doute penser aussi à la résolution des conflits potentiels à cette approche, et penser évolution de la justice pour ne pas s’engouffrer dans un comportement légal qui freinerait en retour le bénéfice de l’initiative pour la sécurité des patients et leur implication dans leur propre santé, ce qui serait contraire à l’esprit de la loi.

Blease, C., Cohen, I. G., & Hoffman, S. (2022). Sharing Clinical - Notes : Potential Medical-Legal Benefits and Risks. JAMA  2022 ; 327(8) :717-718. doi:10.1001/jama.2021.23179

Lire l'article

Questions de genres et préjugés : liens entre sexe du prescripteur et sexe du chirurgien référent

Grande étude canadienne portant sur 40 millions de demandes d’avis spécialisé chirurgical par des généralistes.  

On savait déjà (voir précédentes revues de presse) que les chirurgiens hommes réalisent une plus grande fraction des interventions les plus rémunératrices par rapport à leurs collègues féminines.  

Dans cette étude réalisée de 2016 à 2018 sur base de données nationales dans la province de l’Ontario, les auteurs ont associé le sexe du médecin prescripteur à l’origine de la demande d’avis chirurgical au sexe du chirurgien consulté.

Les résultats portent sur 39 710 784 demandes d’avis chirurgicaux réalisées par 44 983 médecins prescripteurs vers 5 660 chirurgiens (dont 77,5 % hommes).

Les prescripteurs généralistes féminins demandent plus souvent l’avis expert à une femme chirurgien (76,8 % contre 55,3 %, P < .001).

Inversement, les chirurgiens hommes comptent pour 77,5 % de la population des chirurgiens mais reçoivent 87,1 % des demandes d’avis. Les chirurgiens femmes sont moins souvent consultées dans ce cas de prescripteurs hommes (25,4 % contre 33 %, P < .001).

Au total, les chirurgiens femmes ont une surreprésentation finalement mais modérée des demandes venant de généralistes femmes (1,6 % au total, 95 % CI, 1,4 % - 1,9 %), alors que les chirurgiens hommes ont une franche surreprésentation des demandes provenant des généralistes hommes (32 % au total, 95 % CI, 31,8 % - 32,2 %) et ces chiffres sont extrêmement stables dans le temps.

Les préjugés sont loin d’avoir disparus…

Dossa, F., Zeltzer, D., Sutradhar, R., Simpson, A. N., & Baxter, N. N. (2022). Sex differences in the pattern of patient referrals to male and female surgeons. JAMA surgery, 157(2), 95-103.

Lire l'article

Questions de genre : sexe du chirurgien, sexe du patient, et résultats post opératoires

Les questions de genre et de race, et plus globalement les inégalités dans le milieu médical ont pris une importance croissante dans la littérature américaine, particulièrement au Canada, très en avance sur ces sujets. On ne compte plus les articles publiés dans les plus grands journaux scientifiques à ces sujets.

Les résultats dépassent souvent l’entendement et montrent combien il est pertinent de se poser ces questions.

Cet article publié dans le JAMA en est un bon exemple, en étudiant le lien entre le sexe du chirurgien, le sexe du patient pris en charge, et les résultats post opératoires. La méthode est une classique approche rétrospective sur tous les patients Canadiens adultes de l’Ontario ayant subi une des 21 chirurgies les plus fréquentes entre 2007 et 2019. 

Au total, 1 320 108 patients inclus, pris en charge par 2 937 chirurgiens, avec 602 560 patients de même sexe que leur chirurgien (509 634 homme-homme, 92 926 femme-femme) et 717 548 patients de sexe différent de leur chirurgien (667 279 chirurgiens homme-patiente, 50 269 chirurgiens femme-patient). 

189 390 patients de ces cohortes (14,9 %) ont subi un ou plusieurs événements indésirables. 

La discordance de sexe s’associe avec un risque significativement plus élevé d’évènements indésirables [OR, 1.07 ; 95 % CI, 1.04 - 1.09), de complications post opératoires (OR, 1.09 ; 95 % CI, 1.07 - 1.11), et même de surmortalité (par rapport à des concordances de sexe entre chirurgien et patient (OR, 1.07 ; 95 % CI, 1.02 - 1.13). Par contre, il n’y a pas de différence en ce qui concerne le taux de ré-hospitalisation.

Les patientes traitées par des chirurgiens hommes ont plus souvent des problèmes que les patients pris en charge par ces mêmes chirurgiens hommes (OR, 1.15 ; 95 % CI, 1.10 - 1.20); ce n’est pas le cas des patients hommes traités par des chirurgiens femmes qui n’ont pas de sur-risques par rapport aux patientes femmes traitées par ces mêmes chirurgiens femmes.

L’écoute est sans doute une dimension importante de ces différences…

Wallis, C. J., Jerath, A., Coburn, N., Klaassen, Z., Luckenbaugh, A. N., Magee, D. E., ... & Satkunasivam, R. (2022). Association of surgeon-patient sex concordance with postoperative outcomes. JAMA surgery, 157(2), 146-156.

Lire l'article

Réduire les déplacements dans les blocs orthopédiques pour réduire le risque infectieux

L’orthopédie est une spécialité très concernée par le risque infectieux.

Les auteurs proposent une revue de littérature sur le lien entre réduction des entrées-sorties et déplacement en salle d’intervention, et la réduction du risque infectieux.

Au total 18 articles ont été retenus, dont le contenu porte sur 3 thèmes : la qualité de l’air au bloc et la mesure de sa teneur microbienne en lien avec la quantité de déplacements recensés, les déplacements des infirmiers en salle, et les interventions ayant essayé de réduire le risque.

Les résultats sont plutôt décevant en matière de mesure objective du risque, sans doute plus pour des raisons méthodologiques que pour des raisons objectives de non effet des déplacements sur le risque infectieux.

Buckner, L., Lacy, J., Young, K., & Dishman, D. (2022). Decreasing Foot Traffic in the Orthopedic Operating Room : A Narrative Review of the Literature. Journal of Patient Safety, 18(2), e414-e423.

Lire l'article

Quelle formation donner aux cadres de santé pour améliorer la Qualité des soins ?

Cette étude venue du Royaume-Uni basée sur 63 entretiens de cadrage suivis de 122 autres entretiens avec des professionnels. Elle identifie les objectifs et compétences liées à ces objectifs essentiels à inclure dans la formation des cadres de santé pour améliorer la Qualité des soins. 

Six thèmes ressortent comme prioritaires dans la formation (1) adapter et adopter la bonne organisation du service, (2) gérer les priorités dans toutes les exigences de la Qualité, (3) affronter la réalité des vrais problèmes de Qualité  dans le service (4) donner le bon message aux bonnes personnes, (5) permettre le retour d’information et l’apprentissage, et (6) contextualiser le travail. Chacune de ces directions suppose des compétences à acquérir, des façons de faire optimales.

Wright, D., Gabbay, J., & Le May, A. (2021). Determining the skills needed by frontline NHS staff to deliver quality improvement : findings from six case studies. BMJ quality & safety. Online First : 27 August 2021. doi : 10.1136/bmjqs-2021-013065

Lire l'article

Effets des comportements agressifs et inadaptés des médecins sur la qualité de prise en charge des patients

Les comportements inadaptés des médecins, agressifs, peuvent affecter leur prise en charge. Les auteurs proposent une revue de littérature pour faire un point sur la question. 

La revue porte finalement sur 25 études publiées. Toutes confirment le lien entre comportement agressif du patient et moindre qualité de sa prise en charge par la suite, événements indésirables plus nombreux, soins non délivrés… 

Ces comportements sont une menace réelle pour les patients, et doivent donner lieu à une position active de prise en compte, formation et réduction par les organismes et institutions médicales.

Hicks, S., & Stavropoulou, C. (2022). The Effect of Health Care Professional Disruptive Behavior on Patient Care : A Systematic Review. Journal of Patient Safety, 18(2), 138-143.

Lire l'article

Pertinence des soins : dérive des prescriptions inutiles aux Etats-Unis

L’étude part de 646 recommandations de bonnes pratiques de prescription établies au fil des ans par les sociétés savantes dans le cadre de l’effort accordée à une médecine plus pertinente (la campagne Choosing Wisely).

Le non suivi de ces recommandations couvre très largement les prescriptions d’imagerie médicale (26,8 %), les prescriptions d’analyses de laboratoire (24,9 %) le tout particulièrement dans le contexte des maladies chroniques (27 %) ou de patients asymptomatiques ayant simplement un ou deux facteurs de risques.

La plupart de ces soins non pertinents n’ont pas d’impact sur la rémunération du prescripteur (64,2 %), et ont un coût unitaire modéré (< 200 $ pour 45,4 %), mais c’est le nombre croissant qui en fait un poids considérable pour l’état (+ 1,2 %/an, P=0,001), sans parler des risques collatéraux d’événements indésirables associés, soit directs soit encore plus souvent (60,2 %) par le déclenchement d’autres examens en cascade et de surdiagnostics traumatisant à la fois psychologiquement et physiquement pour les patients. 

Ganguli, I., Thakore, N., Rosenthal, M. B., & Korenstein, D. (2022). Longitudinal content analysis of the characteristics and expected impact of low-value services identified in US Choosing Wisely recommendations. JAMA internal medicine, 182(2), 127-133.

Lire l'article

Valeur prédictive de la détection des événements indésirables (EI) par la méthode des "trigger-tool"

La méthode des "trigger-tool" consiste à utiliser un logiciel qui interroge les précurseurs d’événements indésirables (EI) dans les dossiers médicaux informatisés des patients (il s’agit essentiellement de pister des résultats anormaux ou incohérents en rapport au contexte qui ont été ignorés, sans suites données dans les heures ou jours qui suivent). Le système ne fait que détecter un précurseur possible ; il faut après sortir le dossier et analyser plus en détail pour confirmer ou infirmer la nature et l’existence d’un EI. Par contre, il ne demande pas de signalement actif de la part des professionnels ou des patients.

Cette méthode est devenue très utilisée depuis 2000. Ces auteurs espagnols ont évalué la performance de ce système basé sur la détection automatique de 40 précurseurs dans les dossiers patients de 31 hôpitaux du pays. Ils ont mesuré la qualité de prédiction des EI effectivement recensés en chirurgie.

La prévalence des EI observée sur 1 132 interventions est de 32,53 % (toute gravité confondue). Les trigger tool ont détecté 86,27 % de ces EI, avec une sensibilité particulière de 12 des 40 précurseurs. Les auteurs concluent à la grande efficacité de la méthode.

Pérez Zapata, A. I., Rodríguez Cuéllar, E., de la Fuente Bartolomé, M., Martín-Arriscado Arroba, C., García Morales, M. T., Loinaz Segurola, C.,... & Ferrero Herrero, E. (2022). Predictive Power of the "trigger tool" for the detection of adverse events in general surgery : a multicenter observational validation study. Patient Safety in Surgery, 16(1), 1-10.

Lire l'article 

La sécurité du patient à l’âge de la médecine défensive

La définition de la médecine défensive a évolué au fil du temps. Il persiste une distinction entre médecine défensive positive et négative. 

La médecine défensive positive est relative à la surutilisation, aux tests excessifs, au sur-diagnostic et sur-traitement. 

La médecine défensive négative, au contraire, est relative à l'évitement, au repus de prendre en charge ou au choix de transférer rapidement des patients à haut risque vers d’autres praticiens. 

L’article analyse la médecine défensive dans ces deux aspects, et dans leur rapport aux erreurs médicales associées. Ces erreurs sont organisées en 5 classes (erreurs médicales de types opératoire, médicamenteuses, diagnostiques, liés à la procédure et autres).

Deux points sont particulièrement étudiés dans l’article :

  • Le premier point concerne le lien entre médecine défensive et traitements (renoncement à traiter par peur légale, ou l’inverse avec le sur traitement lié au sur diagnostic lui-même associé à des demandes d’examens inutiles).
  • Le second point concerne le déplacement du seuil de décision de traiter/ne pas traiter les patients en fonction de l’évaluation des bénéfices/risques avec une logique du toujours plus pour ne pas s’exposer juridiquement à un reproche.

Dans toutes ces situations, l’événement indésirable peut être multiple, à la fois global et local, avec par exemple dans l’option générale le fait de refuser de prendre en charge, ou de trop traiter, et dans le détail de commettre plus d’erreurs çà et là (plus on va faire d’actes, plus on ajoute des risques d’évènements indésirables à toutes les étapes du soin).

Dans tous les cas, la médecine défensive exige aussi une plus grande sollicitation administrative (on trace plus, on fait plus d’actes), qui quand les ressources manquent, peut en soi-même devenir une autre source d’erreurs surajoutée ou au minimum de manque de Qualité.

La thèse des auteurs associe aussi les différentes erreurs en lien avec la médecine défensive avec le modèle des erreurs de Reason qui distingue un continuum entre erreurs de routines (des attitudes répétées devenues presque automatiques chez les adeptes de ce type de médecine) et de véritables erreurs de connaissances (quand la médecine défensive fait commettre des erreurs de diagnostic et de prise en charge sévère de certains patients).

Les auteurs plaident pour une taxonomie plus visible et plus diffusée des liens existants entre médecine défensive et erreurs médicales.

Shenoy, A., Shenoy, G. N., & Shenoy, G. G. (2022). Patient safety assurance in the age of defensive medicine : a review. Patient Safety in Surgery, 16(1), 1-5.

Lire l'article