Le misoprostol : une large utilisation en gynécologie-obstétrique

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Le misoprostol : une large utilisation en gynécologie-obstétrique en dehors des règles d’autorisation de mise sur le marché (AMM)

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En effet un certain nombre de produits sont utilisés en dehors de leur AMM initiale, tant dans les indications non prévues du médicament que dans les conditions inhabituelles d’utilisation (voie d’administration ou posologie).

Cependant si la sécurité et l’efficacité d’un produit sont garanties par l’AMM, son absence ne signifie pas qu’il n’existe pas de données favorables à son utilisation et n’entraine pas l’exclusion de son usage.

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  • Sage-femme
Auteur : Isabelle LE CREFF / MAJ : 07/09/2018

Il convient quand même de rappeler que si la prescription hors AMM n’est pas interdite en France, elle est néanmoins très encadrée.

La loi du 29 décembre 2011, relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament en précise les dispositions :

- Le prescripteur informe le patient que la prescription de la spécialité pharmaceutique n'est pas conforme à son autorisation de mise sur le marché, de l'absence d'alternative médicamenteuse appropriée, des risques encourus et des contraintes et des bénéfices susceptibles d'être apportés par le médicament et porte sur l'ordonnance la mention : "Prescription hors autorisation de mise sur le marché”.
Il informe le patient sur les conditions de prise en charge, par l'assurance maladie, de la spécialité pharmaceutique prescrite.
Il motive sa prescription dans le dossier médical du patient.

En gynécologie-obstétrique ces prescriptions hors AMM concernent :

  • le misoprostol dans les grossesses arrêtées du premier trimestre
  • le méthotréxate dans la grossesse extra-utérine
  • les inhibiteurs calciques dans la tocolyse

Concernant le misoprostol, les deux spécialités prescrites en gynécologie-obstétrique sont le Cytotec et le Gymiso, utilisé hors AMM pour le premier, avec AMM pour des indications limitées pour le deuxième.

Malgré un dosage identique de misoprostol, leurs indications sont totalement différentes:

  • l’ulcère digestif pour le Cytotec
  • l’interruption médicale de grossesse intra-utérine au  plus tard au 49ème jour d’aménorrhée et la préparation du col utérin avant interruption chirurgicale de grossesse du premier trimestre pour le Gymiso

Pourtant, bien qu’il soit hors AMM le Cytotec est beaucoup plus utilisé que le Gymiso du fait de son moindre coût.

Cette banalisation de l’utilisation en gynécologie-obstétrique de médicaments en dehors de leur AMM initiale, a poussé le collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) à mettre en place une « Commission hors AMM », ayant pour objectif de colliger l’ensemble des publications concernant ces médicaments, et de faire une synthèse sur chacun de leurs usages hors AMM.

Une revue de la littérature a donc été faite sur l’usage hors AMM du misoprostol :

  • pour la dilatation avant un geste chirurgical
  • dans la prise en charge des interruptions médicales et volontaires de grossesse, des fausses couches spontanées au cours du premier trimestre de la grossesse
  • dans la prise en charge des interruptions médicales de grossesse et des morts in utéro aux 2ème et 3ème trimestres
  • pour la maturation du col sur fœtus viable au 3ème trimestre
  • pour la dilatation du col en gynécologie
  • pour la prévention et la prise en charge des hémorragies du post-partum

L’analyse de la pertinence scientifique menée par le CNGOF, des différentes utilisations de ce médicament, a permis d’informer le prescripteur des situations pour lesquelles le bénéfice de l’usage du misoprostol est documenté et de le mettre en garde sur les usages ne reposant sur aucune donnée scientifique.

Dans le même temps et dans le but de faire évoluer les AMM de ces médicaments en restant dans le cadre défini par la loi, l’agence Nationale de sécurité du médicament (ANSM) en collaboration avec le CNGOF et les laboratoires, a travaillé à la mise en place d’essais cliniques et d’éventuelles recommandations temporaires d’utilisation (RTU) ne pouvant excéder 3 ans.

Mais on constate que les laboratoires pharmaceutiques sont peu enclins à demander l’extension de l’AMM d’un produit en gynécologie-obstétrique, les procédures étant longues et coûteuses, les études difficiles à mener chez les femmes enceintes et le bénéfice financier attendu peu attractif.

Conclusion :

La prescription de médicaments hors AMM est tellement banalisée en gynécologie-obstétrique, qu’il est nécessaire d’insister sur l’importance de la pharmacovigilance et de la déclaration des effets indésirables de ces produits.

Rappelons qu’il est de la responsabilité de tous les professionnels, qu’ils soient de la santé, du médicament ou des laboratoires de faire évoluer à partir de données solides, les indications thérapeutiques de ces médicaments, devenus pour certains incontournables dans cette spécialité.

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