Complication mortelle inattendue après un prolapsus utérin chez une vache charolaise

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Complication mortelle inattendue après un prolapsus utérin chez une vache charolaise

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Les complications mortelles du prolapsus utérin sont relativement fréquentes, elles sont généralement immédiates ou rapides et dues à une hémorragie interne ou à un état de choc. Le cas suivant est inhabituel.

Auteur : le Dr Michel Baussier, Docteur vétérinaire / MAJ : 05/03/2021

Cas clinique

L’éleveur intervient dans une stabulation libre pour le vêlage d’une génisse charolaise de trois ans ; extraction déclarée facile. Le prolapsus utérin fait immédiatement suite à l’expulsion du veau. L’éleveur appelle ses vétérinaires (cabinet de groupe).

Le vétérinaire intervient rapidement après l’appel de l’éleveur.

La vache n’est pas isolée des autres animaux (vaches et veaux) dans la case de stabulation ; l’intervention se passe sur la litière sale dans des conditions incommodes, voire sportives quant à l’accès au site d’intervention. Il n’existe pas de box de vêlage.

Le décollement du placenta étant impossible, l’ensemble de l’utérus et de son placenta, après toilette antiseptique rapide, est remis en place ; la réduction s’effectue normalement ; la vache s’est toutefois couchée au cours de l’intervention. Un bouclement vulvaire est effectué avec des épingles et un laçage classique.

Deux heures plus tard, sous l’effet d’efforts expulsifs violents, le prolapsus menace de récidiver malgré le bouclement vulvaire. Le vétérinaire, rappelé, ré-intervient.

Il constate quelques dilacérations vulvaires comme conséquence des efforts de la génisse sur les épingles mises en place. Il peut cette fois réaliser normalement et complètement la délivrance manuelle.

La réduction est à nouveau menée à bien. Les épingles sont remises en place et un laçage est une nouvelle fois réalisé.

Les efforts persistent et l’éleveur rappelle deux heures plus tard. Une prescription téléphonique est alors réalisée (injection d’un médicament à base de xylazine et d’un autre médicament à base de dipyrone et de N-butyl-hyoscine). Le traitement se montre cette fois efficace.

Le surlendemain, soit une journée après le retrait du laçage, une considérable inflammation vulvaire œdémateuse apparaît, évoluant sur plusieurs jours en une gangrène (œdème malin ou charbon du part). L’état général de la femelle se dégrade pendant un mois, à l’issue duquel elle ne se relève plus. Elle ne pourra pas allaiter son veau. Elle sera finalement euthanasiée après un mois de soins locaux et généraux.

La pathogénie de l’important ténesme de cette génisse puis celle de la paraplégie différée n’ont pas été déterminées avec certitude. Quelques hypothèses : contusions cervico-vaginales au cours d’une extraction forcée peut-être pas aussi facile que celle complaisamment décrite par l’éleveur, lésion vertébrale et compression ou irritation de racines nerveuses, origine métabolique…

La mauvaise hygiène de l’élevage a favorisé l’infection et n’a pas permis de la juguler.

L’événement indésirable grave (EIG) au cours des soins est ici constitué par l’évolution fatale imprévue de ce vêlage en raison d’un épisode inattendu de gangrène gazeuse ; les suites de ce vêlage ayant dans un premier temps été rattachées par l’éleveur exclusivement et erronément à l’intervention du praticien lors du prolapsus.

La relation de l’éleveur avec ses vétérinaires n’était pas une relation fondée sur la confiance. Cet EIG a détérioré la situation.

Propositions d'actions préventives

  • L’hygiène de l’élevage est la première condition de réussite ; c’est le premier facteur de prévention des complications infectieuses. "L’élevage, c’est de l’hygiène en action" (Leclainche).
  • La vaccination des ruminants contre les infections à germes anaérobies est à peu près incontournable en élevage rationnel.
  • Les vétérinaires devraient pouvoir exiger des éleveurs des conditions hygiéniques et confortables de réalisation de leurs interventions obstétricales. La présence d’un box de vêlage dans les stabulations est indispensable.
  • La réalisation d’interventions et de soins de qualité, notamment d’un suivi attentif, nécessite une relation confiante et partenariale entre l’éleveur et son vétérinaire.
Référence
PEYRE (E). Principales causes et approche diagnostique des morts subites chez les ruminants. Thèse doctorat-vétérinaire ENVA, 2009