Les médecins sont de plus en plus soumis à un contrôle par indicateur de leur pratique, à la fois pour des objectifs de qualité et de coût.
Ils sont aussi soumis à une pression croissante pour démontrer qu’ils sont ‘plus patients-centrés’ (patient-centered care). Mais la définition de ce terme dans la pratique reste floue.
Beaucoup de médecins pensaient être ‘patient-centrés’ depuis longtemps ; ils découvrent des demandes et des indicateurs assez différents de leurs attentes pour mesurer cette qualité du soin.
Parmi ces nouveaux indicateurs, les articles récents font une part importante à la rapidité de sortie de l’hôpital (emblématiquement la décharge de chirurgie ambulatoire à J0 mais aussi les protocoles de récupération rapide avec décharge de J1 à J3), la cohérence de la destination (indicateurs de parcours, réhabilitation, retour à domicile, etc), et bien sûr, la mesure de la coordination avec cette destination (lettres de sortie, dates et contenus).
Des scores de risques de décès ou de complications ont même été élaborés par le collège US des chirurgiens sur un mixte de tous ces nouveaux indicateurs.
Parmi les conséquences de ces avancées, ces nouveaux indicateurs sur la sortie de l’hôpital servent maintenant d’outils de comparaison inter-établissements, avec pour conséquence à terme (et pour certains déjà aujourd’hui) un impact sur la rémunération à la performance Qualité des hôpitaux (P4P).
Or la plupart des éléments pris en compte à ce jour (voire tous ?) pour construire et valider ces indicateurs et en calculer le risque ajusté,- c’est le cas les indicateurs qui privilégient la décharge précoce-, sont purement cliniques, basés sur les facteurs de risques connus ante-chirurgie, sur les évènements du per-chirurgical. On a peu ou pas considéré dans le calcul des indicateurs les facteurs sociaux du patient et de son domicile qui sont à l’évidence très importants dans la survenue des complications, et particulièrement la capacité de l’aide à domicile à assumer une continuité de traitement. La sécurité du patient pourrait en être très affectée, et son résultat presque inverse de ce que l’on attend en bénéfice.
Plusieurs auteurs suggèrent donc une révision assez importante du calcul de ces types d’indicateurs pour incorporer cette dimension, en incorporant des éléments d’enquête sur le domicile du patient, sa capacité personnelle et des aidants qui l’entourent à gérer correctement et en relative autonomie son traitement.
L’analyse publiée ce mois-ci dans l’article de JAMA surgery cité en fin de ce papier, va beaucoup plus loin que les remarques habituelles sur la présence ou pas de l’aidant ; elle incline à se reposer la question de l’évaluation d’une politique ‘patient centrée’, et à une analyse d’accompagnement assez lourde dès la consultation initiale de chirurgie (pour établir le parcours adéquat).
En attendant, inclure en l’état ce type d’indicateur dans l’enveloppe de paiement à la performance qualité des hôpitaux apparaît peut-être un peu précoce et pourrait même s’avérer contre-productif pour un résultat optimal de sécurité.
Pour aller plus loin
Hyder J. n, Hischberg R., Nguyen L. Home discharge as a Performance Metric for surgery, JAMA surgery, >2015, 150 (2), 96-97