Galea S. What Can Be Learned From Nonadherent Patients to Promote the Health of Populations ? JAMA Health Forum. 2024;5(8):e243025.
Sans doute par reflet d’un paternalisme historique et dominant en médecine, reflet aussi d’un savoir par nature asymétrique, les médecins - et professionnels de santé - pensent détenir la solution pour le meilleur de ce que doit faire le patient/la population pour rester en bonne santé.
Cette approche rend aussi implicitement responsables patients (individus) et populations de leur devenir et de leurs complications s’ils ne suivent pas les recommandations basées sur la science.
Le Covid a été le dernier grand pourvoyeur de réflexions sur le sujet tant les écarts ont pu être importants en volume et nature entre recommandations et pratiques de certaines parties de la population.
Cet article essaie de tirer des leçons sur la compréhension des moteurs de ces écarts persistants.
La première famille de cause est relative au point de vue adopté sur la rationalité de la décision. On pourrait penser a priori que tous les acteurs rationnels (patients ou populations) souhaitent suivre les prescriptions parce qu’il en va de leur intérêt et de leur santé. Mais ce qui fait la différence est la façon de calculer bénéfices et inconvénients pour la santé d’une part par les professionnels et d’autre part par les patients. Par exemple un patient peut craindre des effets secondaires d’un médicament, décrits comme usuels par le médecin, mais vécu comme ayant un vrai impact sur la qualité de vie par ce patient.
De même au niveau populationnel, une recommandation rationnelle de ne pas visiter des personnes âgées en période épidémique peut être totalement contrebalancée par ses inconvénients sur le moral et l’isolement, et non suivie volontairement par les proches.
De même une affirmation sous-jacente à l’adhésion thérapeutique présume que le patient a compris que ce qui est prescrit est important. Or il y a de nombreux cas où la communication initiale est loin d’être convaincante de la part du professionnel, et loin d’être comprise par le patient. Par exemple, les risques qui portent sur ses propres conduites vis-à-vis d’un risque que l’on ferait subir aux autres au niveau populationnel sont souvent peu expliqués, et mal compris.
Une troisième limitation au suivi des prescriptions est bien sûr la capacité financière du patient à le faire, y compris parfois dans la façon impossible de suivre le traitement compte tenu de la vie professionnelle du patient.
Enfin, une quatrième famille de barrière au suivi des prescription reste le mode de vie imposé par la prescription, très souvent restrictif, trop prudent, qui enlève largement de la saveur et du plaisir à vivre, et que le patient va accommoder pour conserver une partie de ce plaisir quitte à en assumer le risque.
La compréhension de ces différentes familles de limite devrait promouvoir une prescription moins asymétrique dans ses bases, plus discutée, plus négociée avec le patient compte tenu de ce qu’il considère prioritaire pour sa santé et son plaisir.
Un article de réflexion sur un sujet croissant publié dans un journal majeur.