Hypersensibilité aux statines tardivement diagnostiquée. Décès de la patiente

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Hypersensibilité aux statines tardivement diagnostiquée. Décès de la patiente

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  • Quatre soignants brancardent une femme dans le couloir de l'hôpital - La Prévention Médicale

Les antécédents d’allergie doivent être tracés au sein des dossiers des patients et accessibles avant toute prescription. Tout nouveau patient doit faire l’objet d’un interrogatoire soigneux à la recherche de ce type de problème.

Auteur : le Dr Christian Sicot / MAJ : 13/06/2024

Cas clinique

Depuis 2011, une femme de 61 ans, ancienne aide-soignante, est régulièrement suivie par un cardiologue pour une HTA, une dyslipidémie et un surpoids (IMC = 25 kg/m2). Son traitement associe : Amlor® 5, Aprovel® 300, Esidrex® 25.

Il n’est pas fait mention d’allergie mais d’une "intolérance" au Coversyl®, au Zanextra®, au Nisis® et aux statines (simavastatine).

Le 7 novembre 2021, cette patiente est amenée, par le SMUR, aux Urgences du Centre hospitalier proche de son domicile pour : "Douleurs thoraciques fluctuantes, rétrosternales depuis 4 jours, majorées à l'effort. Asthénie et faiblesse des 4 membres".

Examen clinique : TA 12/7, auscultation cardiaque normale, turgescence jugulaire. Amélioration partielle de la douleur sous trinitrine. À l’ECG, sus-décalage de ST dans le territoire antérieur (V2, V3). Traitement par Aspirine, Brilique® et Héparine.

Transfert immédiat vers le Centre Cardiologique Spécialisé du département.

Hospitalisation en réanimation du 7 au 15 novembre :

Angiographie et angioplastie coronaire en urgence : 

  • L'IVA2 présente une sténose sub-occlusive (90-99 %) > 20 mm de long.
  • Mise en place d'un stent actif, au niveau de l'artère interventriculaire antérieure proximale sur la lésion. Après contrôle angiographique, l'artère interventriculaire antérieure proximale est indemne de lésion significative. Le flux coronaire est normal.
  • Conclusion : infarctus antérieur aigu revascularisé sur l'IVA. Lésion mono-tronculaire. Séquelle apicale avec hypokinésie modérée à recontrôler. Tendance bradycarde bien tolérée. 

Le traitement en cours se compose de :

  • Acide acétylsalicylique 75 mg (Kardegic®) - sachet : 1 matin.
  • Ticagrelor 90 mg (Brilique®) - comprimé : 1 matin, 1 soir.
  • Torvastatine (calcique) 80 mg (Tahor®) - comprimé : 1 soir.
  • Irbesartan 300 mg - comprimé : 1 matin.
  • Ezetimibe 10 mg (Ezetrol®) - comprimé : 1 soir.
  • Pantoprazole 20 mg - comprimé : 1 soir.
  • Acebutolol (chlorhydrate) 200 mg (Sectral®) - comprimé : 1/4 de comprimé le matin.
  • Amlodipine (bésilate) 5 mg - gélule : 1 midi.
  • Bromazepam 1,5 mg - comprimé : 1 soir.

Poursuite de l’hospitalisation au Centre Cardiologique Spécialisé dans le service de rééducation cardio-vasculaire du 15 novembre au 7 décembre. Atorvastatine : passage de 80 à 40 mg/j.

Puis, en hôpital de jour du 14 au 24 décembre : le 16 décembre, ASAT > 3 N, myoglobine > 2N.

Le programme va comprendre des séances d'entraînement sur tapis et de la gymnastique de faible intensité et va se dérouler sans incident, notamment au plan douleur, et en l’absence de modification ECG. 

À sa sortie, la patiente "se sentait bien". Mais au bout de quelques jours, elle se plaint d’un amaigrissement et d’un prurit généralisé qui l’empêche de dormir la nuit. 

Au repas de Noël, elle réitère ses plaintes (nausées, anorexie, prurit persistant). Ses enfants ne la trouvent pas comme d’habitude : elle est fatiguée, amaigrie, elle se gratte beaucoup et son teint est jaunâtre.

Début janvier 2022, le fils de la patiente téléphone au Centre Cardiaque Spécialisé pour parler à l’un des deux cardiologues ayant pris en charge sa mère lors de son hospitalisation, le Dr A. ou le Dr B. Le Dr B. est en congés. Le Dr A. est sur place mais la communication ne lui est pas transmise. Le standard passe une personne du service de réadaptation, non identifiée (après enquête a posteriori de l’établissement). Le fils de la patiente explique à cette personne la situation de sa mère et évoque une intolérance médicamenteuse. La personne au téléphone aurait répondu : "on n’est pas un centre d’allergologie", et n’aurait pas donné de suite. Les enfants de la patiente contactent alors son médecin traitant.

Le 24 janvier, consultation du médecin traitant : "Prurit depuis 3 semaines, perte de poids, ictère conjonctival, pas de fièvre, ni de douleur abdominale. Asthénie." Proposition de consulter aux Urgences du Centre hospitalier, refusée par la patiente.

Prescription d’un bilan biologique.

Le 25 janvier,  bilirubine totale : 94 mg/L, libre : 10 mg/L ; ALAT : 439 UI/L. Phosphatases alcalines : 856 UI/L. Hb : 12,5 g/dL, GB : 5 300/mm3 (% éosinophiles ?) ; CRP : 2 mg/L. La patiente accepte la décision de son médecin traitant d’aller aux Urgences du Centre hospitalier.

Hospitalisation au Centre hospitalier du 26 au 31 janvier.

Le 26 janvier, aux Urgences du Centre hospitalier, prescription d’un scanner abdomino-pelvien. En raison de l’ictère, d’un abdomen sensible dans la région épigastrique et de la perturbation des EFH, "…Vésicule multi micro-lithiasique sans signe de cholécystite aiguë. Pas de dilatation des voies biliaires, ni du Wirsung. Pas de calcul suffisamment dense pour être visible". Conclusion de l’urgentiste : "Il s’agit probablement d’une migration lithiasique". À hospitaliser en chirurgie.

Le 1er février, transfert de la patiente dans une clinique pour ECPR (écho-endoscopie des voies biliaires) avec éventuellement sphinctérotomie. "Ulcères nécrotico-hémorragiques du bulbe et de D2 sans sténose, ni caractère suspect. Pas de calcul du cholédoque. La migration a sans doute eu lieu. Dans ces conditions pas de sphinctérotomie…".

Le 3 février, sur les conseils du gastro-entérologue du Centre hospitalier, Transfert de la patiente dans un hôpital voisin pour une IRM bilio-pancréatique afin d’éliminer une lésion biliaire ou pancréatique pouvant expliquer un ictère cholestatique. Aucune lésion ne sera retrouvée.

Le 4 février, à son retour au Centre hospitalier, la patiente se plaint de myalgies généralisées avec un taux de CPK à 2 244 UI/L et surtout apparait une oligo-anurie avec une insuffisance rénale d’aggravation rapide justifiant l’admission en réanimation.

Le 4 février, à l’entrée en réanimation "Patiente apyrétique, consciente, orientée et très asthénique. Faiblesse musculaire périphérique surtout au niveau des membres inférieurs. Les ROT sont absents aux membres inférieurs. Aux membres supérieurs, la force musculaire est symétrique mais les ROT sont très faibles. Pas de paralysie faciale - État hémodynamique stable : PA 120/80 mmHg ; FC : 67/ min - Eupneique sous O2 nasal avec une SpO2 à 98 %. Absence de râles - Ictère conjonctivo-cutané.

Biologie :

  • GB 10 600/mm3, Hb : 12,2 g/dL, plaquettes : 213 000/mm3
  • TP : 95 %, TCA : 1,03 sec
  • Urée : 38,8 mmol/L, créatininémie 755 mmol/L
  • Glycémie : 8,16 mmol/L, Na : 125 mmol/L, K : 5,5 mmol/L, RA : 23,8 mmol/L
  • Myoglobine : > 932 ng/mL
  • Bilirubine totale : 45,7 mmol/L, ASAT : > 911 UI/L, ALAT : 378 UI/L, Phosphatases alcalines : 313 UI/L
  • D-dimères : 2 142 mg/L

Au total : probable myosite aiguë sur prise de statines, responsable d’une insuffisance rénale aiguë avec rhabdomyolyse majeure et hyperkaliémie dans un contexte d’asthénie importante et de cholestase.

Traitement initial : hydratation sérum physiologique et sérum glucosé 5 %, alcalinisation, reprise du Brilique®, anticoagulation préventive, protection gastrique double dose.

Le 6 février, alors que la patiente était sous épuration extra-rénale continue depuis 24h, apparition de douleurs abdominales et des membres, surtout à droite, très intenses avec un examen abdominal normal mais persistance d’un déficit des 4 membres coté à 2/5, associé à une mâchoire tombante depuis le matin.

À  11 heures, douleur thoracique suivie après quelques minutes, sur le scope, d’une fibrillation auriculaire puis d’un tracé plat. Après prise en charge immédiate, retour d’un tracé "irrégulier". Mais nouvel arrêt cardiaque non récupéré malgré les tentatives de réanimation cardiaque. Décès de la patiente.

Conclusion : 

  • Insuffisance rénale aiguë anurique multifactorielle : utilisation de Sartan (antagoniste des récepteurs de l’angiotensine II), administration de produits de contraste iodés et forme sévère de rhabdomyolyse probablement secondaire à l'utilisation de statine, ayant nécessité la mise en place d'une épuration extra-rénale.
  • Survenue d'un arrêt cardio-circulatoire le 6 février 2022 avec défaillance multi-viscérale post ressuscitation, notamment défaillance hémodynamique, entraînant le décès de la patiente. 

Saisine de la Commission de Conciliation et d’Indemnisation (CCI) par les ayants-droit de la patiente pour obtenir réparation des préjudices subis (juin 2022).

Expertise (novembre 2022)

Pour les deux experts, praticiens hospitaliers, l’un réanimateur et l’autre cardiologue :

(...)

Cause du décès

La patiente est décédée en réanimation le 6 février 2022 d'une asystolie non récupérée, survenant dans un contexte de défaillance multiviscérale qui associait une insuffisance rénale aigue anurique, une insuffisance hépatique sur hépatite cholestatique sévère, des ulcères nécrotico-hémorragiques duôdénaux et une rhabdomyolyse majeure généralisée, sans évidence de complication cardiaque de l'infarctus de novembre 2021 (fonction ventriculaire gauche conservée, pas de signes ECG de récidive d'infarctus par occlusion du stent coronaire, mais notion d'une fibrillation auriculaire lors de la réanimation de l'arrêt cardiaque).

L'hépatite cholestatique et la rhabdomyolyse (apparue secondairement) sont imputables à une intolérance médicamenteuse à l'atorvastatine, comme l’a reconnu le centre régional de pharmacovigilance qui a considéré que "la responsabilité de l'atorvastatine dans la survenue de ces effets a été retenue. Il s'agit toutefois de la considérer comme l'un des éléments (NB : que les experts considèrent comme prédominant) ayant pu conduire à la survenue de l'arrêt cardio-circulatoire." (Voir en fin d’observation).

La prise en charge de l'infarctus aigu du myocarde aux Urgences du Centre hospitalier (le 7 novembre 2021), en unité de soins intensifs cardiologiques et en cardiologie aiguë (du 7 au 15 novembre 2021), puis en réadaptation cardiovasculaire du Centre Cardiologique Spécialisé (du 15 novembre au 7 décembre 2021; Dr A. cardiologue) et enfin en hôpital de jour (du 13 au 24 décembre 2021 ; Dr B.cardiologue) est conforme aux règles de l'art et aux données acquises de la science.

Le traitement par statine

Une prescription de statine était indiquée en prévention secondaire post-infarctus du myocarde chez une patiente ayant une hypercholestérolémie connue avec un taux de cholestérol LDL (LDLc) à l’arrivée à 1,54 g/l, avec un double objectif de réduction d'au moins 50 % du LDLc basal et d’un taux de LDLc abaissé en dessous de 0,55 g/l (recommandations 2019 des Sociétés européennes de cardiologie et d'athérosclérose).

Une forte dose d'atorvastatine (80 mg/j) associée à Ezetimibe® 10 mg a été prescrite en USIC et en cardiologie aigue (du 7 au 15 novembre 2021). Cette prescription est conforme aux recommandations de la Société européenne de cardiologie de 2021 (statine de haute intensité) et du consensus d'experts français (association d'emblée d'une statine haute intensité et d'Ezétimibe® si LDLc > 1,50 g/l).

La dose d'atorvastatine a été diminuée à 40 mg en réadaptation cardiovasculaire à partir du 15 novembre jusqu'à la sortie à domicile le 07 décembre 2021 et a été poursuivie ensuite (prescription de fin de réadaptation ambulatoire du Dr B. cardiologue du 21 décembre 2021).

Les taux de LDLc ont été contrôlés à deux reprises, à 0,75g/l le 5 décembre 2021 et à 0,63 g/l le 16 décembre 2021 (sous atorvastatine 40 mg et Ezetimibe® 10 mg par jour).

La prescription de la surveillance biologique de l'atorvastatine a été conforme aux recommandations de bonnes pratiques : dosage d'enzymes hépatiques dans les 3 mois. Les transaminases ASAT (origine hépatique et musculaire) et ALAT (origine hépatique) ont été contrôlées normales le 5 décembre 2021, mais en augmentation modérée le 16 décembre 2021, tant pour les ASAT (3 x normale) que les ALAT (2 x normale).

L'élévation des ASAT/ALAT semble avoir été enregistrée par un membre de l'équipe soignante (chiffres entourés sur la feuille cumulative de résultats), mais le Dr B. confirme lors de l’expertise qu'il n'a pas eu connaissance de ce résultat et n'a pas mis en œuvre de mesures particulières comme la prescription d'un dosage de contrôle, un interrogatoire sur les symptômes et un examen clinique. À  ce stade, compte tenu de l'élévation inférieure ou égale à 3 x normale, l'arrêt ou la réduction de doses de l'atorvastatine ne semblaient pas indispensables, mais une surveillance, oui.

Il n’y a pas eu de dosage de CPK (créatine phosphokinase, enzyme musculaire). Les recommandations ne prévoient pas de dosage systématique des CPK sous statines, mais uniquement en cas de myalgies qui paraissent avoir été absentes pendant toute la durée d'hospitalisation et de suivi. Le contrôle d'ASAT/ALAT a été associé à un dosage de myoglobine (protéine musculaire), normale le 5 novembre 2021 mais augmentée (2 x normale) le 16 décembre 2021). L’Ezetimibe® et l'atorvastatine ont été suspendus à partir du 4 février 2022.

L'intolérance aux statines

Deux courriers du cardiologue traitant, antérieurs aux faits, mentionnent une intolérance de la patiente à plusieurs traitements antihypertenseurs et aux statines en avril 2013, en octobre 2020 et juin 2021 : "intolérance au Coversyl®, Zanextra®, Nisis® et aux statines, et plus particulièrement à la simvastatine".

La nature de cette intolérance n’est pas détaillée dans ces courriers.

Lors de l’expertise, le médecin traitant précise qu’il a prescrit de la simvastatine en 2012 à la patiente en raison de la dyslipémie, mais qu’il l’a arrêtée au bout de 3 mois en raison de crampes. Aucun dosage d’enzymes musculaires n’a été fait à cette occasion.

Si la notion d’"intolérance aux statines" est avérée, elle n’apparait dans aucune observation des médecins ayant pris en charge la patiente en 2021 et 2022.

La dose d’atorvastatine a été diminuée par le Dr A. cardiologue de 80 à 40 mg en début de la réadaptation cardiaque, d’après ses dires, non pas en raison d’une intolérance, mais en raison de son habitude à initier les statines à doses intermédiaires et, non à fortes doses d’emblée.

Responsabilités

Le comportement du Dr B. cardiologue (mis en cause) n'est pas conforme. En effet, il n'a pas donné de suite à la réception du bilan biologique de contrôle qu'il a prescrit, en fin de réadaptation cardiaque, qui a été réalisé le 16 décembre 2021 et dont les résultats lui ont été transmis.

Cet examen biologique montrait une élévation modérée des enzymes hépatiques, à trois fois la normale pour les ALAT, à deux fois la normale pour les ASAT, ainsi qu'une élévation modérée de la myoglobine à deux fois la normale.

Ces trois paramètres étaient normaux lors du bilan précédent du 5 décembre 2021. L'élévation des enzymes hépatiques et de la myoglobine auraient dû conduire le Dr B. à prescrire un bilan biologique de contrôle dans les 8-15 jours, ce qui aurait possiblement évité la survenue ou, au moins certainement raccourci le délai de diagnostic de l'hépatite cholestatique, dont les premiers symptômes sont survenus entre le 21 et le 25 décembre 2021, et peut-être évité son évolution rapide constatée à partir du 24 janvier 2022.

Le comportement de l’urgentiste (non mis en cause, exercice public exclusif) et de l'équipe du service de chirurgie digestive du Centre hospitalier (mis en cause) est conforme pour la période du 26 janvier au 2 février 2022. Mais, il ne semble pas conforme le 3 février 2022, au retour de la clinique. Malgré la survenue de myalgies et la faible probabilité que la persistance des troubles hépatiques soit liée à une pathologie biliaire dont le caractère obstructif, s'il a existé, n'était plus présent, l'équipe médicale a demandé un second examen hépatobiliaire (bili-IRM) qui a nécessité un nouveau transfert de la patiente dans un autre hôpital ce qui a retardé le diagnostic d'hépatite cholestatique médicamenteuse d'environ 24 heures. 

La réponse apportée par le Centre Cardiaque Spécialisé (mis en cause) lors de l'appel téléphonique du fils de la patiente début janvier 2022 n'est pas conforme aux bonnes pratiques.

L'inquiétude de la famille de la patiente était légitime, l'analyse des symptômes de leur mère appropriée, le questionnement sur une possible intolérance médicamenteuse était fondé. Un contact avec le Dr A. ou un autre cardiologue présent aurait probablement permis d'avancer une consultation, de réaliser un bilan biologique, de faire un diagnostic plus précoce des complications, d'arrêter l'administration d'atorvastatine et donc de limiter le risque vital de ces complications.

Les comportements non conformes du Dr B. cardiologue, et du Centre hospitalier et le défaut d'organisation du Centre Cardiaque Spécialisé n'ont pas de lien direct et certain avec le décès mais constituent une perte de chance de l'avoir évité, par poursuite de l'atorvastatine sans surveillance biologique rapprochée à partir du 16 décembre 2021 et par retard diagnostique des complications hépatiques, musculaires et rénales du traitement par atorvastatine".

Les pourcentages respectifs de perte de chance de survie, que les experts évaluent à 80 %, sont estimés à :

  • 50 % pour le Dr B… cardiologue,
  • 25 % pour le Centre Cardiaque Spécialisé,
  • 5 % pour le Centre hospitalier.

Avis de la Commission de Conciliation et d’Indemnisation (février 2023)

La Commission considère que la perte de chance de survie subie par la patiente est de 80 % dont :

  • 50 % à la charge du Dr B. cardiologue,
  • 25 % à la charge du Centre Cardiaque Spécialisé,
  • 5 % à la charge du Centre hospitalier.

Déclaration de pharmacovigilance du 22 avril 2022

Déclaration concernant la survenue d'une Insuffisance rénale, d'une cholestase et d'un arrêt cardiaque, chez une patiente de 61 ans, suite à une prise en charge par atorvastatine 40 mg, enregistrée de manière anonyme dans la base nationale de pharmacovigilance sous la référence…. et transmise à l’ANSM.

Pour rappel, les principaux antécédents de la patiente sont : une cardiopathie ischémique, une hypertension artérielle et une hypercholestérolémie.

Pour reprendre la chronologie des faits

En novembre 2021, l'atorvastatine 40 mg a été débuté suite à la survenue d'un infarctus du myocarde, en prévention d'une récidive.

Le 26 janvier 2022, devant un ictère avec prurit, asthénie et perte d'appétit, un bilan biologique réalisé aux urgences a mis en évidence une insuffisance rénale et une cholestase. 

À partir du 4 février 2022, la prise en charge a été effectuée en service de réanimation. Une épuration extra rénale a été réalisée en raison de l'aggravation de l’insuffisance rénale. Sur le plan hépatique, les anomalies du bilan biologique se sont stabilisées, la cholestase a régressé.

Le 6 février 2022, un arrêt cardiocirculatoire avec défaillance multiviscérale a entrainé le décès.

Concernant l'insuffisance rénale

L’atorvastatine peut dans de rares cas affecter les muscles et l'excès de myoglobine qui en résulte peut entraîner une insuffisance rénale aiguë sévère. L'atteinte rénale a donc été expliquée majoritairement par ce médicament, et une épuration extra-rénale a été effectuée.

Concernant la cholestase

L'atteinte du foie est également mentionnée dans la notice de ce médicament. La cholestase qui peut survenir rarement avec l'atorvastatine, a nettement diminué d'après le compte-rendu qui nous a été communiqué.

Concernant l'arrêt cardiocirculatoire 

Sur le plan chronologique, la responsabilité médicamenteuse dans la survenue de cet effet ne peut être exclue. Mais ce type d'effet n'est pas mentionné dans la notice de ce médicament. Et de façon générale, la pathologie coronarienne peut entrainer des troubles du rythme et représente une grande part des causes d'arrêt cardiocirculatoire. La cardiopathie ischémique ancienne, dont souffrait la patiente a pu favoriser l'apparition d'un trouble du rythme qui a été diagnostiqué le 6 février 2022. Il a été conclu que le décès était lié à cette atteinte cardiaque.

Au total, la responsabilité de l'atorvastatine dans la survenue de ces effets a été retenue. Il s'agit toutefois de la considérer comme l'un des éléments ayant pu conduire à la survenue de l'arrêt cardiocirculatoire.


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