Contention et analgésie mal maîtrisées, l’accident aurait pu être plus grave

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Contention et analgésie mal maîtrisées, l’accident aurait pu être plus grave

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  • Gros plan sur la tête d'un poney Connemara - La Prévention Médicale

Un geste chirurgical avec une anesthésie de courte durée, doit bénéficier de toutes les barrières de prévention pour protéger l’animal, le soignant et les aidants. Sans la mise en œuvre de précautions connues par les professionnels de médecine vétérinaire, les conséquences peuvent être potentiellement graves. Illustration par un événement indésirable (EI) en pratique équine.

Auteur : le Dr Vétérinaire Michel BAUSSIER – Président d’Honneur du conseil national de l’Ordre des vétérinaires / MAJ : 09/05/2025

Cas clinique

Un poney Connemara âgé de quatre ans (1,30 m au garrot environ, poids estimé de 300 kg), présente un accrochement de la rotule (postérieur droit).

Des traitements conservateurs et physiothérapiques ont été tentés sans succès et une desmotomie rotulienne est décidée.

L’animal a été convenablement préparé à l’intervention, une diète hydrique de 12 heures avait été instituée.

L’intervention a lieu à domicile, auprès de l’écurie, à l’extérieur. Deux personnes de la famille du propriétaire apportent leur aide au praticien.

Les conditions de contention sont plutôt frustes, l’opération sera réalisée sur l’animal en position debout, une personne le tenant court par une longe assujettie au licol.

Pour cette intervention, jugée rapide et mineure, une sédation légère est réalisée par voie intraveineuse avec la spécialité Domosédan®, ND (chlorhydrate de détomidine, 10 mg/ml). La dose injectée est de 0,6 ml. Il est attendu 10 mn avant d’intervenir pour la préparation de la zone opératoire mais l’animal n’est pas isolé, on continue à parler et s’agiter autour de lui.

La préparation chirurgicale de la région du grasset droit est ensuite effectuée, l’animal étant maintenu au licol, aucun entravon n’étant placé au postérieur droit.

Une anesthésie locale est pratiquée sans difficulté ni réaction avec une injection sous-cutanée en regard du ligament patellaire (ou tibio-rotulien médial) de 5 ml de Procamidor®, ND (procaïne à 2%).

Encouragé par l’absence de réaction, le praticien s’apprête deux minutes plus tard à introduire son bistouri-ténotome à travers la peau pour le glisser sous le tendon mais le seul contact avec la peau déclenche une ruade réflexe du seul postérieur droit, sans conséquence sur le site opératoire mais atteignant la main d’un des aides, victime alors d’un hématome heureusement sans conséquence sérieuse.

Cet incident, dont la gravité des conséquences auxquelles on venait d’échapper a immédiatement été perçue, a constitué un avertissement. Il a conduit le praticien à renforcer la sédation et l’analgésie et reprendre l’intervention avec succès, après contention renforcée (entravon) et ré-aseptisation du site opératoire. 
Les suites ont été normales, tant pour l’animal opéré que pour la personne légèrement blessée.

Dans ce cas, aucune action en responsabilité n’a été engagée.

Il s’agit pourtant incontestablement d’un événement indésirable grave (EIG) en ce sens que l’incident aurait pu être lourd de conséquences, tant pour le cheval que pour les personnes de son entourage immédiat.

Le retour d'expérience

  • Il n’existe pas d’intervention chirurgicale mineure.
  • La contention ne doit jamais être négligée.
  • L’anesthésie, c’est d’abord l’analgésie !
  • Si la contention n’a pas pour but de suppléer à une anesthésie insuffisante, l’anesthésie pallie la contention à condition, notamment en l’absence de narcose, que l’analgésie soit parfaite.
  • Ne pas oublier non plus que la sédation par les agonistes des récepteurs alpha-2 adrénergiques peut entraîner, outre une certaine ataxie, une augmentation de la sensibilité des membres postérieurs aux stimuli tactiles et qu’occasionnellement des réactions défensives de type ruade peuvent survenir, y compris chez des animaux en apparence bien sédatés. 

Propositions d'actions préventives

  • Raisonner la contention, la préparer, préparer l’équipe des personnes qui aident.
  • Pour la bonne installation de la sédation, isoler l’animal au calme absolu.
  • Un sous-dosage de sédatif, en l’occurrence un alpha-2 agoniste, n’est pas forcément anodin.
  • Respecter le temps minimal d’installation de l’effet sédatif.
  • Préférer les anesthésiques locaux puissants quand ils sont autorisés dans l’espèce concernée aux anesthésiques locaux autorisés mais plus anciens et moins efficaces.
  • Vérifier prudemment l’effet de l’anesthésie locale avant le premier geste chirurgical proprement dit.