Complication sur une intervention banale à visée non médicale sur une tortue

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Complication sur une intervention banale à visée non médicale sur une tortue

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  • LAYANI Sandrine: Gros plan sur les mains gantées d'un vétérinaire qui présente une petite tortue de terre - La Prévention Médicale

Le décès d’un animal de compagnie dans les suites de la pose d’un transpondeur est rarissime et surtout non attendu par le propriétaire de l’animal et le médecin vétérinaire. Ce partage d’expérience doit permettre de mieux cerner certains risques et de mettre en œuvre des barrières de prévention.

Auteur : le Dr Vétérinaire Michel BAUSSIER / MAJ : 03/12/2025

Cas clinique

À J1, un transpondeur (puce électronique) est posé par le docteur vétérinaire A sur la cuisse gauche d’une petite tortue terrestre (250g) dans un but d’identification de l’animal.

À J3, le propriétaire consulte pour douleur et inflammation au niveau de la cuisse gauche. Un anti inflammatoire et un anti œdémateux sont prescrits.

À J4, le propriétaire consulte un autre praticien, le docteur vétérinaire B. Ce dernier réalise une radiographie et découvre une fracture du fémur avec perte de sensibilité et motricité du membre. La densité osseuse lui paraît faible. Une hospitalisation et un traitement antibiotique sont décidés.

À J6, en l’absence d’amélioration, une amputation est réalisée.

La tortue sera euthanasiée quelques semaines plus tard car elle dépérissait.

Sans équivoque, la fracture a eu lieu au cours de la manipulation de la tortue pour la pose de la puce. L’identification par pose d’un transpondeur est un acte vétérinaire qui nécessite une contention de l’animal.

Commentaire

Habituellement, une fracture fait suite à un choc suffisamment important pour briser un os, qui est, après l'émail dentaire, la structure la plus solide du corps. Les fractures qui ont lieu en cas d'ostéoporose sont essentiellement des fractures spontanées, c’est-à-dire, survenant à la suite d’un choc minime. Elles sont dues à une fragilisation de la trame osseuse. Une pathologie courante chez les tortues terrestres est susceptible de favoriser ces fractures spontanées, il s’agit de l’ostéofibrose nutritionnelle.

La simple traction sur un postérieur pour la pose d’une puce ne constitue pas généralement un traumatisme susceptible de générer une fracture sur un os normal.

Le Dr B, dans son compte rendu, évoque une densité globale osseuse paraissant faible. Il a, du reste, prescrit en postopératoire une cure de calcium, en raison de la suspicion de minéralisation osseuse anormale. La manipulation peut donc ne pas être la seule responsable de la fracture, une pathologie présente avant l’intervention a pu favoriser sa survenue.

Aucun symptôme général, ni déformation majeure de la carapace ne permettait de la suspecter. Par ailleurs, réaliser une tranquillisation anesthésique aurait sans doute été préférable dans ce cas mais cet acte n’est pas dénué de risque. Les carences en calcium peuvent être liées à des déséquilibres en apport ou à une augmentation des besoins (phases de croissance).

La radiographie seule, de qualité insuffisante, présentée à un vétérinaire spécialiste en NAC, n’a pas permis de conclure à la présence d’une ostéodystrophie osseuse. De plus, le spécialiste a indiqué avoir été déjà confronté à ce cas sur une tortue adulte de parc zoologique en parfaite santé... le propriétaire ayant tiré trop fort sur le membre pour l’étendre.

Ce débat sur l’éventualité d’une ostéodystrophie osseuse a eu lieu dans le cadre de la recherche d’une responsabilité civile professionnelle. Les experts n’ont pas pu ici se prononcer de façon décisive sur l’existence ou non d’une ostéodystrophie et son rôle dans la fracture, si bien qu’en définitive, dans le cas d’espèce, dans un cadre amiable consensuel, la responsabilité du premier praticien a été admise et le propriétaire a été indemnisé.

Discussion

L’existence d’une ostéofibrose nutritionnelle, quand elle peut être préalablement diagnostiquée, ne doit pas empêcher la réalisation de l’identification. 

L’information sur les risques doit alors être donnée au propriétaire et la contention doit alors être adaptée.

Propositions d'actions préventives

  • Les interventions de convenance, à visée non médicale, ne sont que faussement bénignes et banales et font ressortir et majorer l’aspect d’EIG au cours des actes, lesquels ne sont pas ici véritablement des soins.
  • Il convient d’acculturer les équipes au sein des établissements de soins vétérinaires à la pratique d’une contention douce en première intention.